Démocratie

Rôle du #FreeSenegal lors des émeutes de mars 2021 au Sénégal : comment les jeunes ont utilisé les outils numériques pour sauver une démocratie menacée

Rôle du #FreeSenegal lors des émeutes de mars 2021 au Sénégal : comment les jeunes ont utilisé les outils numériques pour sauver une démocratie menacée
Des manifestants font face aux policiers lors des émeutes de Mars

Le Sénégal a traversé en début de mois l’une des pires crises de son histoire, avec une vague de manifestations n’a épargné aucun parti du pays. Au milieu des manifestations, le gouvernement sénégalais, bousculé par une campagne en ligne à travers le hashtag #FreeSenegal, a perturbé Internet, révélant à quel point la démocratie est fragile sans le droit d’exprimer sa dissidence et de parler librement. Mais s’il en est ainsi, c’est que même si manifestations ont eu lieu dans les rues, celles-ci ont été principalement organisées en ligne. Des initiatives des jeunes sénégalais qui ont largement participer à sauvegarder une démocratie menacée.

Décrit comme un ilot de stabilité dans une région en perpétuelle tension, le Sénégal a évité le pire de justesse. Le pays a, en effet, traversé début mars l’une des pires crises de son histoire. Une situation qui a poussé le gouvernement sénégalais a coupé Internet dans la soirée du 4 mars 2021, au lendemain de l’une des plus grandes séries de manifestations de l’histoire moderne du Sénégal. Facebook, WhatsApp, Telegram, YouTube et d’autres canaux de communication sociale ont été limités.

En fermant l’un des moyens de communication les plus importants au Sénégal, le gouvernement entendait réprimer l’ampleur des manifestations contre le président Macky Sall et son régime. Cette pratique de restriction d’Internet et des réseaux sociaux n’est pas unique au Sénégal. La coupure et la limitation d’Internet sont une pratique de longue date employée par les gouvernements pour empêcher les manifestations et contrôler la diffusion de l’information, en particulier en Asie du Sud et en Afrique.

Mais dans un monde de plus en plus numérique, l’accès à Internet est devenu un droit de l’homme, et les gouvernements et les fournisseurs de services Internet ne devraient pas avoir la capacité de le fermer, en particulier dans les pays à démocratie fragile. Au Sénégal, où 70% de la population électorale a moins de 40 ans, où la pénétration d’Internet est de 46% et augmente rapidement, et où une partie importante de l’électorat est dans la diaspora, l’accès à Internet est nécessaire pour faire respecter la démocratie.

Alors que le Sénégal a été présenté comme le dernier soldat permanent en matière de démocratie en Afrique, le statut du pays en tant que démocratie stable est de plus en plus mis en doute.

Les manifestations, qui ont commencé le 3 mars, juste avant l’arrestation de Sonko, sont devenues meurtrières le 4 mars et après, la police et les milices tuant 13 personnes, dont la plupart avaient moins de 25 ans, et en blessant plusieurs centaines d’autres. Plus de 500 manifestants ont été arrêtés pour pillage et / ou pour avoir participé à une manifestation non autorisée. Plusieurs activistes, comme Guy Marius Sagna, sont toujours en prison. Les chaînes de télévision SenTV et WalfTV ont été empêchées de rendre compte des manifestations en direct.

Mais tout ceci n’a pas empêché au monde entier de savoir ce qui se passe au Sénégal. Mais s’il en est ainsi, c’est que si les manifestations ont eu lieu dans les rues, elle ont tout de même été principalement organisées en ligne. Les jeunes sénégalais ont rapidement initié et rallié le hashtag #FreeSenegal, qui a désormais recueilli plus de 3 millions de tweets et plus de 1,6 milliard d’impressions et a été partagé sur les réseaux sociaux, y compris sur Instagram.

Cette situation a d’ailleurs inspiré l’une des plus brillant Sénégalais du moment, l’informaticien et statisticien travaillant dans le domaine de l’intelligence artificielle, Adji Bousso Dieng. « En tant que technologue sénégalais de la diaspora, je suis inspiré par la façon dont les jeunes du pays ont exploité la technologie pour lutter pour leur démocratie », a déclaré l’ancienne du Lycée Valdiodio Ndiaye de Kaolack.

Une poignée de publications sur les réseaux sociaux autour du hashtag ont également été traduites dans plusieurs autres langues pour toucher un public plus large. Cependant, ces traductions étaient limitées car les outils de traduction ne sont pas disponibles en wolof, la langue principale du Sénégal. « En tant que chercheur en intelligence artificielle, je pense que de meilleures technologies de traduction des langues africaines telles que le wolof deviendront cruciales dans ces types de mouvements numériques à l’avenir », a ajouté Adji Bousso Dieng, qui assure que malgré cette limitation, le hashtag a été un moyen efficace de mobiliser les efforts des Sénégalais sur le terrain et dans la diaspora pour sensibiliser aux menaces à la démocratie et à l’injustice sociale persistante au Sénégal.

Ce n’est pas la première fois que la jeunesse sénégalaise utilise Internet comme un outil révolutionnaire pour la démocratie. En juin 2011, un groupe de jeunes blogueurs sénégalais a lancé Sunu2012 , une plateforme dédiée à la diffusion d’informations sur les candidats à la présidentielle 2012 et leurs plateformes. La plate-forme à succès a tiré parti des réseaux de médias sociaux tels que Facebook et Twitter pour fournir les résultats des élections en temps réel en ligne pour plus de transparence et a été utilisée par les internautes sénégalais et plusieurs médias sénégalais comme une ressource fiable.

« L’impact des initiatives menées par les jeunes alimentées par Internet au Sénégal, telles que Sunu2012 et #FreeSenegal, montre le rôle qu’un Internet sans entraves peut jouer pour permettre aux citoyens d’exprimer leur dissidence et d’exercer la liberté d’expression, deux éléments cruciaux de la démocratie », explique encore Dieng.

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