Turquie: le pasteur américain reste en détention, nouvelle audience en juillet
©klinfos.com-Mercredi 09 Mai 2018 – Un pasteur américain jugé en Turquie pour des liens présumés avec des groupes « terroristes » a été maintenu en détention lundi à l’issue d’une nouvelle audience de son procès, une décision qui risque d?exacerber les tensions entre Ankara et Washington.
Le tribunal d’Aliaga, dans la province d’Izmir (ouest) a justifié le maintien en détention du pasteur Andrew Brunson, arrêté en octobre 2016, par les « risques de fuite », selon une correspondante de l’AFP sur place.
Le procès a été ajourné au 18 juillet.
« Que puis-je dire de plus? Je voudrais rentrer chez moi », a déclaré le pasteur au tribunal avant que le juge n’accède à la demande du procureur de le maintenir en détention.
Le pasteur s’était efforcé pourtant tout au long de la journée de démentir avoir aidé des groupes « terroristes », face à des témoins à charge.
Andrew Brunson, qui dirigeait alors une petite église protestante à Izmir, risque jusqu’à 35 ans de prison. Son procès s’était ouvert le 16 avril.
Les autorités turques l’accusent d’avoir agi pour le compte du réseau du prédicateur Fethullah Gülen à qui Ankara impute le putsch manqué de juillet 2016, mais aussi pour le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Ces deux organisations sont considérées comme terroristes par la Turquie.
L’audience a commencé avec la déposition par visioconférence d’un témoin anonyme dont le visage a été flouté. Il a notamment affirmé que la propagande du PKK était véhiculée pendant les offices religieux célébrés dans l’église, selon une correspondante de l’AFP sur place.
Il a aussi accusé le pasteur d’avoir élaboré un plan « pour créer un Etat kurde chrétien en Irak et en Syrie ».
« Il dit avoir vu des drapeaux du PKK. Je n’ai jamais vu de telles photos prises dans notre église », s’est défendu le pasteur. « Je n’ai jamais soutenu le discours le PKK. »
« Je rejette toutes les accusation au sujet du PKK. Je ne les ai jamais soutenus », a-t-il ajouté.
Installé en Turquie depuis une vingtaine d’années, Brunson est aussi accusé d’espionnage à des fins politiques ou militaires.
– Le gouvernement américain « scandalisé » –
Un autre témoin, Eyup Cakir, a affirmé que l’église dans laquelle officiait le pasteur ressemblait à un « camp kurde » et que des prières pour les combattants kurdes en Syrie, liés au PKK, y étaient régulièrement récitées.
« Je vais le dire clairement, le PKK est une organisation terroriste. Si nous étions des sympathisants du PKK, les Turcs ne viendraient pas dans notre église », a rétorqué le pasteur.
Signe que l’affaire est suivie de près par Washington, le chargé d’affaires Philip Kosnett et la vice-présidente de la Commission américaine sur la liberté religieuse internationale Sandra Jolley étaient présents lundi au tribunal.
« Les gens au plus haut niveau du gouvernement américain (..) sont scandalisés par cette affaire », a déclaré Mme Jolley à la presse après l’annonce de la décision. « Nous partons d’ici avec des graves inquiétudes pour l’avenir d’un homme innocent ».
A l’ouverture de son procès, le mois dernier, le pasteur américain avait déjà rejeté toutes les accusations portées contre lui, avant de fondre en larmes. « Je n’ai rien fait contre la Turquie. Au contraire, j’aime la Turquie, je prie pour elle depuis 25 ans », a-t-il dit.
Cette affaire a ravivé les tensions entre la Turquie et les Etats-Unis, deux alliés au sein de l’Otan dont les relations traversent des turbulences depuis deux ans en raison notamment de désaccords sur la Syrie.
Après la mise en détention du pasteur, Donald Trump s’était fendu d’un tweet dans lequel il avait déclaré qu’il n’y avait « aucune raison » que le pasteur soit poursuivi en justice.
Le ministre turc des Affaires étrangères turc Mevlüt Cavusoglu a toutefois défendu dimanche la légitimité du procès affirmant que le sort du pasteur était « une décision qui appartient à la justice ».
En septembre, le président turc Recep Tayyip Erdogan avait évoqué l’idée d’échanger le pasteur Brunson contre le prédicateur Gülen, qui vit en exil aux Etats-Unis. Une hypothèse balayée par Washington.
Avec AFP
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