Aminata Touré à la tête du CESE : tout sur une institution à l’évolution témoin des différentes transmutations de l’histoire politique du Sénégal
Par décret présidentiel, le chef de l’État Macky Sall a nommé Madame Aminata Touré à la tête du Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE). Mais c’est quoi cette institution désormais placée sous la présidence de l’ancien Premier ministre du Sénégal? KLINFOS vous propose de mieux faire connaissance avec ce qu’il convient d’appeler une institution à l’évolution témoin des différentes transmutations de l’histoire politique du Sénégal.
MISSIONS
Le Conseil Economique, Social et Environnemental est la deuxième Assemblée constitutionnelle du Sénégal. Il constitue auprès des pouvoirs publics, une assemblée consultative qui peut être saisi par Le Président de la République, L’Assemblée Nationale ou le Premier Ministre au nom du Gouvernement, de demandes d’avis ou d’études.
Composé des forces vives de la Nation, le Conseil économique et social est un lieu de collaboration et de participation des catégories socioprofessionnelles à la politique économique, sociale et environnementale de la Nation. Il examine les évolutions en matière économique, sociale et environnementale et suggère les adaptations nécessaires. Il promeut une politique de dialogue et de coopération avec les Collectivités locales et les organismes similaires étrangers.
Il peut se saisir de l’examen de questions économiques, sociales et financières, entreprendre à cet effet les études et enquêtes nécessaires et émettre en conclusion, les avis et suggestions de réforme qui lui paraissent de nature à favoriser le développement économique, social et environnemental de la Nation.
Il est saisi, pour avis, par le Président de la République :
obligatoirement pour les projets de lois de programme et de plan à caractère économique, social ou environnemental ;
facultativement pour les projet de loi de programmation définissant les orientations pluriannuelles des finances publiques, des projets de lois, d’ordonnances ou de décrets ainsi que des propositions de lois entrant dans le domaine de ses compétences.
Le CESE peut également être saisi, de demande d’avis ou d’études par le Président de la république, le Président de l’Assemblée nationale ou le Premier Ministre.
Il peut, de sa propre initiative, attirer l’attention du Gouvernement et de l’Assemblée nationale sur les réformes qui lui paraissent nécessaires tout comme il contribue à l’évaluation des politiques publiques à caractère économique, social ou environnemental.
Enfin, le CESE peut être saisi, par voix de pétition signée par 5.000 citoyens, de toute question à caractère économique, social ou environnemental.
COMPOSITION
Le Conseil économique, Social et Environnemental est composé de 80 conseillers et de 40 membres associés, tous de profils divers et variés. Cette diversité des membres fait la richesse de l’Institution. C’est ainsi que sont représentés les acteurs de :
la vie économique et du dialogue social ;
la cohésion sociale et territoriale et de la vie associative ;
de la protection de la nature et de l’environnement.
Le CESE comprend : quatre-vingt (80) conseillers nommés pour un mandat de cinq (5) ans renouvelable une fois et quarante (40) membres associés, personnalités adjointes au CESE pour une durée d’une année renouvelable.
Le mandat de membre du Conseil est gratuit et son exercice ne peut donner droit qu’à des remboursements de frais de transport ou à des indemnités de session ou de déplacement.
Les différentes instances du CESE sont :
l’Assemblée plénière composée des 80 conseillers et 40 membres associés ;
le Bureau comprenant le Président, les six vice-présidents et les six secrétaires ;
le Président ;
la conférence des présidents comprenant le Bureau et les présidents de commission ;
les 10 commissions techniques :
Commission de l’Économie, des finances, de la conjoncture et du Commerce.
Commission du Développement rural
Commission du Développement industriel, de l’énergie et des technologies
Commission de la Santé et des affaires sociales
Commission de la jeunesse, de l’éducation, de la formation du travail et de l’emploi
Commission de l’Artisanat, de la culture du tourisme et des sports
Commission du Développement territorial et local
Commission du Genre, de l’équité et de la bonne gouvernance
Commission du Cadre de vie, de l’environnement et du développement durable
Commission Spéciale du plan, des études générales et de synthèse
Le CESE tient deux sessions ordinaires par an (de février à avril et de septembre à novembre). Il peut se réunir en session extraordinaire à chaque fois que de besoin.
Un Secrétaire Général, nommé par décret sur proposition du Président assure l’administration du Conseil Economique, Social et Environnemental. Il participe aux réunions du Bureau dont il assure le secrétariat.
Un directeur de cabinet assure la coordination du Cabinet du président du CESE.
HISTORIQUE
L’évolution du Conseil économique, social et environnemental est indissociable des différentes transmutations qui ont ponctué l’histoire politique du Sénégal. De 1961 à 2012, le Conseil a joué un rôle déterminant dans l’orientation des politiques publiques, notamment en matière de développement économique, social et culturel. Il a reçu diverses orientations au gré des autorités.
Crée par la loi n° 61–52 du 23 juin 1961, le Conseil économique, social a été constitutionnalisé en 1963 par la loi n° 63-22 du 07 mars 1963, en son titre IX, article 88, portant révision de la constitution du Sénégal. Les dispositions relatives à sa composition, son organisation et ses règles de fonctionnement ont été fixées par l’ordonnance n°63–08 du 04 juillet 1963.
De 1964 à 1968, le Conseil économique et social a été présidé par M. Léon Boissier PALUN. Lors de cette mandature, le Bureau du Conseil était composé de deux (02) Vice présidents et de deux (02) secrétaires élus. L’attention que le Président Senghor portait à l’Institution justifiait l’élargissement de ses missions avec l’avènement de la loi n°67–32 du 20 juin 1967, portant modification de la Constitution de 1963. Ainsi, outre le Président de la République, le Conseil assiste l’Assemblé nationale.
En 1968, M. Doudou THIAM est nommé à la tête de l’institution. De nombreuses mesures ont été prises pour renforcer l’autonomie et les pouvoirs du Conseil. La loi organique n°65–05 du 20 mars 1968 rend incompatible la fonction de Président du Conseil économique et social et celle de Député. La loi n°68–06 du 20 mars 1968 autorise le Président de la République à nommer le (la) Président (e) du Conseil par décret en dehors des autres membres.
Sur le plan protocolaire, avec l’avènement du décret n° 68–296 du 20 mars 1968, modifiant le décret n°64–337 du 14 mai 1964 fixant l’ordre de préséance des corps et autorités aux cérémonies publiques, le (la) Président (e) du Conseil est devenu(e) la troisième personnalité de l’Etat, après le Président de la République et le Président de l’Assemblée nationale.
M. Magatte LÔ succède à M. THIAM à la tête du Conseil de mai 1968 à juin 1972. Sous sa mandature, le Président SENGHOR a fait siéger au Conseil, 15 personnalités choisies en fonction de leur compétence, dont le Recteur de l’Université de Dakar.
M. Magatte LÔ a été remplacé par M. Amadou Karim GAYE, de juin 1972 à novembre 1975, avant de revenir à la tête de l’institution de novembre 1975 à juin 1984. Le Bureau du Conseil a été élargi en 1973 avec quatre (04) Vice-présidents et deux (02) Secrétaires élus de plus.
En 1984, le Président Abdou DIOUF nomme M. Mamba GUIRASSY à la tête du Conseil. La loi constitutionnelle n°91–25 du 05 avril 1991 renforce les attributions de l’institution. Désormais, le Conseil assiste le Président de la République, le gouvernement et l’Assemblée nationale. Cette réforme semble vouloir conférer plus de poids aux avis et études émanant du Conseil.
En 1993, M. Famara Ibrahima SAGNA est porté à la tête du Conseil. Par le décret n°94–232 du 03 mars 1994 le (la) Président (e) du Conseil économique et social devient la quatrième personnalité de l’Etat après le Président de la République, le Président de l’Assemblée nationale et le Premier ministre.
De 1994 à sa dissolution en janvier 2001, la mandature de M. SAGNA a été marquée par l’élargissement de la liste des membres du Conseil à des conseillers associés, l’acquisition d’un siège, la création d’un Observatoire, l’augmentation des indemnités, la fréquence de ses publications, la création de deux périodiques (la Revue du Conseil et le Journal des Actes), en plus du rapport annuel, d’une bibliothèque et de la réorganisation des archives.
Ce dynamisme, reconnu par les pouvoirs publics, a contribué au renforcement de la crédibilité des Avis du Conseil malgré les pressions de la Banque mondiale pour sa suppression.
En 2003, le Président Abdoulaye WADE apporte le premier changement de la dénomination de l’institution après une courte période de suppression (janvier 2001-juin 2003). La loi n°2003–15 du 19 juin 2003 portant révision de la Constitution du 22 janvier 2001, a ressuscité l’institution en créant le Conseil de la République pour les affaires économiques et sociales. M. Mbaye Jacques DIOP a présidé aux destinées de l’Institution jusqu’à sa suppression et la création à nouveau du Conseil économique et social, respectivement, par les lois constitutionnelles n°2008-31 du 07 août 2008 et n°2008-32 du 07 août 2008. M. Ousmane Masseck NDIAYE a été nommé pour diriger ce nouveau Conseil.
En 2012, le Président Macky SALL, par la loi n°2012–16 du 28 septembre 2012, portant révision de la Constitution, supprime et remplace le Conseil économique et social par le Conseil économique, social et environnemental. La nomination d’une femme, en la personne de Madame Aminata TALL, à la tête de cette Institution, constitue une première dans l’histoire politique et institutionnelle du Sénégal.