Campagne arachidière: l’Etat silencieux, la Chine premier client
La campagne arachidière n’a pas encore commencé que les paysans grondent. Le prix de l’arachide vient d’être fixé à FCFA 210 le kilo par le Comité national interprofessionnel de l’arachide (Cnia), une proposition de prix similaire à l’an dernier qui reste soumise à l’approbation du Ministère de l’agriculture, souligne l’Agence de presse sénégalaise.
Il s’agit bien d’une proposition et non du prix officiel, mais cette nouvelle n’enlèvera pas les craintes des producteurs avant le démarrage de la campagne qui devrait s’éffectuer lundi, le 25 novembre. En effet, mardi dernier, alors qu’aucune proposition n’avait encore été réalisée, les paysans de Sine Saloum contestaient déjà les rumeurs désignant un prix de FCFA 210, et profitaient de la tribune qui leur était offerte pour affirmer leurs revendications centrée sur une augmentation du prix de l’arachide au kilo : « L’État pouvait aller jusqu’à 225 francs CFA. Nous représentons plus de 70% de la population sénégalaise, donc nous devons avoir notre part dans le budget, car avec nos factures d’eau et d’électricité, nous avons les mêmes charges que les citadins », pouvait-on lire dans Senenews.
Le silence de l’Etat
L’Etat est pointé du doigt. L’absence de Premier ministre met fin aux rencontres qui précédaient généralement la campagne entre les acteurs et le gouvernement avant de fixer les prix. Les paysans dénoncent ainsi une gestion solitaire du ministre Moussa Bladé : « Nous sommes stupéfaits. Ce ministre à la différence de Pape Abdoulaye Seck, est injoignable. Il n’implique aucun acteur dans la gestion de la filière, il va vers un échec cuisant ». Le silence du gouvernement se prête alors à toutes les spéculations : « C’est comme si l’État voulait nous préparer à une reculade sur la subvention du prix de l’arachide, ce qui sera catastrophique ».
Il semblerait que le monde paysan de l’arachide désire une chose simple : être écouté et avoir un interlocuteur avec lequel échanger. Les restructurations gouvernementales demandent peut-être un temps d’adaptation, la nécessité de réinventer des modèles d’échanges entre les acteurs de la filière et le gouvernement.
D’autant que ce dernier avait bien préparé la campagne avec le financement de la Sonacos par la Société islamique internationale de financement du commerce (ITFC) ou par le renforcement de ses relations avec la Chine qui est un acteur clé pour l’arachide sénégalais.
La Chine, premier client du Sénégal
Au début du mois, la Chine a invité des PME sénégalaises pour la deuxième Exposition internationale des importations de la Chine (CIIE) qui s’est ouvert le 5 novembre à Shangaï et a fermé ses portes le dimanche suivant. L’occasion pour Diass Anta Guèye, responsable marketing de la Sonacos de déclarer « La Chine est un grand marché qui est ouvert aux produits africains ».
Un évènement qui permet également à l’entreprise de rencontrer les autorités chinoise de la filière arachide à l’origine de l’achat de 400 000 tonnes d’arachides lors de la dernière campagne : « C’est un rendez-vous important qui nous a permis de renouer nos contacts, de fidéliser nos clients et de nouer de nouveaux partenaires », peut-on lire dans un entretien de la responsable accordée à Xinhua. Un discours qui démontre un rapprochement certain entre les deux pays.
En effet, en 2018, l’Empire du Milieu était le premier client du Sénégal pour l’arachide et ses dérivés, témoigne l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD) du Sénégal. La Chine a aménagé un régime de préférence commercial pour promouvoir les exportations de pays en développement comme le Sénégal, souligne l’Agence de presse Xinhua. Le géant asiatique représente 97,2 % des expéditions d’arachide non grillée du pays. De même, la Chine est à la tête des importations d’huiles brute d’arachide (35%), devant des pays tels que les Pays-Bas (23,1%), la France (16,6%) et l’Italie (12,7%).
Rappelons que la Chine est également productrice d’arachide, mais sa production est déficitaire. Une situation qui a favorisé les rapprochements entre les deux pays. La Chine a multiplié la mise en œuvre d’instruments de soutient au commerce des pays africains, parmi lesquels on peut noter le Forum sur la coopération sino-africaine (FCSA), dont le Sénégal est le co-président, et des instruments de financement comme la banque Eximbank. La Chine semble donc être un allier de poids à l’aube du démarrage de la nouvelle campagne, tous les regards sont à présents tournés vers le Ministre de l’agriculture.