« Le sacrifice, on le fait ou on le fuit »: l’émouvante lettre d’un ex commissaire de police à Guy Marius Sagna et Cie
LETTRE A GUY MARIUS SAGNA, DR BABACAR DIOP ET LES AUTRES…
« Le sacrifice, on le fait ou on le fuit »
Chers jeunes frères, tout d’abord, permettez-moi, non seulement de vous adresser mes très vives et sincères félicitations pour l’acte historique que vous avez posé en vous rendant en toute responsabilité devant le siège de la légitimité populaire, c’est-à-dire le Palais de la République dont l’actuel occupant n’ est qu’un simple locataire, mais aussi de vous exprimer toute ma profonde compassion à la fois pour les douleurs physiques que vous avez endurées et le traumatisme moral et psychologique dont vous avez certainement souffert. La noblesse de votre haut fait, et c’en est vraiment un, va au-delà de son symbolisme et de votre courage physique ; elle traduit, sans équivoque aucune, la volonté inébranlable, la détermination sans faille, l’engagement patriotique et la foi en l’avenir d’une jeunesse révolutionnaire, d’une nouvelle génération admirablement consciencieuse et parfaitement consciente de ses devoirs et de rôle envers son vaillant peuple.
Chers jeunes frères, votre acte audacieux, à la limite de la témérité, aura permis aux différentes autorités du pays, notamment Aly Nouilles Ndiaye et singulièrement le Président de la République de prendre conscience de la défaillance du dispositif sécuritaire et de la carence ainsi que de la faillite des responsables en charge de la sécurité du palais et environs, et plus généralement de la sécurité publique. En principe, le ministre de l’intérieur aurait dû démissionner ou être démis de ses fonctions ; une démission que je n’ai eu de cesse d’exiger et qui se justifie amplement, aujourd’hui, non seulement du fait d’une insécurité globale grandissante qu’il n’arrive pas à juguler, mais aussi pour des raisons que je ne saurais exposer sur la place publique. Pour moins que cela Mbaye Ndiaye a été limogé ; seulement je comprends parfaitement qu’il ne soit pas facile et aisé de se séparer d’un complice, d’un comparse. Je profite de l’occasion pour dire, ex-professo, à son Excellence Macky Sall, Président de la République, qu’il y a des failles, des insuffisances et des dysfonctionnements dans le dispositif sécuritaire global du pays qui résultent de plusieurs facteurs relevant de la vision, des orientations stratégiques, des approches tactiques et des modalités pratiques opérationnelles ; je ne peux en dire plus.
Chers jeunes frères, heureusement que vous n’étiez que de braves et honnêtes citoyens, guidés par l’amour viscéral de la patrie, mus par de nobles et admirables desseins et animés des meilleures intentions en voulant, non seulement manifester tout simplement, pacifiquement et en toute légitimité, votre opinion comme notre constitution vous en donne le droit, un droit inaliénable et inamissible, mais aussi vous faire l’écho de la sourde et profonde colère des populations. Imaginons, un seul instant, et j’en ai déjà des frissons et la chair de poule, qu’à la place de paisibles citoyens que vous êtes, se fussent d’ignobles terroristes harnachés et bardés de lourdes ceintures d’explosifs et munis d’un lance- roquette. Vous aurez permis, à votre corps défendant, aux autorités de l’Etat, de tester en grandeur nature leurs capacités d’anticipation et de riposte au cas elles auraient à agir ou réagir dans un contexte plus hostile et plus complexe d’une autre tonalité.
Chers jeunes frères, pour l’amour du ciel et au nom de la fraternité que nous partageons et qui nous lie dans la sincérité, l’intensité et la véracité de notre engagement citoyen et patriotique pour la délivrance de notre peuple longtemps opprimé du joug tyrannique du Président Macky Sall et d’un système installé depuis les premières heures de notre accession à la souveraineté, je vous demande, pour autant que vous êtes à même d’y souscrire sans renier vos principes, sans vous départir de votre philosophie d’action, de mettre un terme à votre grève de la faim. Je ne condamne point l’initiative dont l’objectif, du reste très noble et acceptable, est non seulement d’alerter les opinions nationale et internationale, mais aussi, surtout et par- dessus tout, de vous faire l’écho amplifié de la souffrance et la misère de notre peuple martyrisé.
Chers jeunes frères, il y a que vous devez prendre conscience de la juste mesure du combat qui doit être mené et comprendre que la lutte ne saurait être réduit à des manifestations sporadiques et conjoncturelles, bien que spectaculaires ; elle sera longue, dure et ardue ne laissant place à aucune faiblesse ni à aucun répit, elle aura forcément une dimension ontologique en ce sens que son issue, heureuse ou malheureuse , conditionnera et déterminera pour bien longtemps, les conditions de vie voire de survie de notre peuple. Aussi, devra-t-il vous être facile de réaliser que nous avons besoin de vous voir en pleine et totale disposition de toutes vos capacités physiques et intellectuelles et de toutes vos forces morale et psychologique pour mener cette lutte de libération dont la jeunesse doit être le fer de lance, comme elle en fait la formidable démonstration dans d’autres pays. S’il doit y avoir un procès, il faut que vous vous y rendiez, prêts à tout point de vue, pour non seulement dénoncer les dénis de justice et l’injustice qui prévalent dans notre pays, mais aussi faire retentir dans le temple de Thémis, la voix du peuple et donner, ainsi, un effet retentissant à son cri de détresse.
Chers jeunes frères, vous devez certainement être perplexes devant l’attitude amorphe de l’opposition, prise dans globalité, qui a montré son indifférence totale au mal vivre quotidien des Sénégalais. Cela ne doit point vous étonner ; à part quelques-uns d’entre eux qui s’efforcent de résister à travers des communiqués sporadiques et laconiques, souvent pour se donner bonne conscience, la plupart des opposants semble adopter un profil bas. Peut-être sont-ils toujours sous l’effet de sidération provoqué par la victoire maculée et frauduleuse de Macky Sall, ou s’agit-il de l’observance d’une période de repos et de ressourcement pour mieux rebondi ; souhaitons vivement qu’il en soit ainsi. Toujours est-il que les problèmes et les difficultés quotidiens, pressants et urgents que vivent les populations ne peuvent s’offrir le luxe d’un quelconque répit pour leur prise en charge et leur dénonciation. Le drame pour cette opposition, c’est la présence, en son sein, de chevaux de Troie au service de Macky Sall ; bientôt les masques tomberont. Certains opposants vous en veulent parce qu’ils pensent bêtement que vous leur ravissez la vedette et que vous évoluez dans un champ et sur un registre qu’ils croient être les leurs exclusivement. Il y en a parmi eux, je me garderai de citer des noms, qui jamais ne trahiront le peuple, parce qu’étant des hommes et des femmes de convictions, imbus de dignité, d’honneur, de fierté, soucieux des conditions d’existence de leurs compatriotes et aimant leur patrie.
Chers jeunes frères, ne désespérez pour rien au monde, et comme disent les Anglais « Never say die » ; assumez votre mission historique générationnelle de lutte pour la libération des masses populaires afin qu’elles retrouvent la plénitude de leur pouvoir légitime confisqué par des ploutocrates dont des francs-maçons avérés et homosexuels notoires, adeptes d’une vie dissolue caractérisée par une concupiscence effrénée, des débauches connues de tous et qui excelle dans le vandalisme financier, le grand banditisme économique, le vol de haut voltige, le trafic de cocaïne, de chanvre indien et drogues de synthèse, les détournements de deniers publics, la prostitution et le proxénétisme de luxe, le faux monnayage, l’insulte facile et le mensonge public sans retenue, sans gêne et sans honte.
Chers jeunes frères, Il faut vous investir de toutes vos forces et de toute la détermination nécessaire pour mener l’œuvre de conscientisation des populations dont l’apathie et le fatalisme peuvent, quelquefois, amener à désespérer. Faisons en sorte que les Sénégalais comprennent qu’ils ne doivent pas déléguer leurs responsabilités ni leur pouvoir encore moins confier leur sort à des politiciens madrés mus par leurs seuls intérêts égoïstes ; nos populations doivent définitivement comprendre qu’il n’existe aucun exemple concret dans le monde d’un peuple ou d’une nation qui ait changé sa condition autrement que par ses sacrifices et sa volonté d’aboutir.
Chers jeunes frères, vous me permettrez, m’adressant à tous les mouvements citoyens, de vous faire certaines préconisations et recommandations qui me paraissent utiles, nécessaires et plus productives dans le noble combat que vous menez pour la délivrance du peuple des fourches caudines de nos dirigeants. Il vous faudra revoir vos stratégies de lutte et plus particulièrement vos tactiques de mobilisation et d’occupation de terrain. Je constate une pléthore, une diversité et une multiplication constante des mouvements qui tous s’inscrivent dans la même dynamique de lutte citoyenne. Toutes ces entités déclarent agir pour l’éveil de l’esprit civique, la promotion de la conscience citoyenne et l’engagement patriotique. Aussi me parait-il judicieux, plus efficace et plus productif de procéder à des regroupements organiques plus restreints et mieux structurés. Pour ce faire, il faudrait que chacun se départisse de son égoïsme pour faire montre d’altruisme en faisant don de soi pour la cause commune. Proscrivez la recherche d’un leadership individuel qui ne contribue qu’à l’éclatement de vos cheminements vers le même but. L’atomisation des mouvements citoyens constitue à la fois leur vulnérabilité et leur faiblesse.
Chers jeunes frères, je vous réitère mes encouragements appuyés, vous réaffirme toute ma solidarité fraternelle et vous transmets le soutien indéfectible des citoyens patriotes et engagés qui se demandent comment, dans un pays comme le Sénégal qui se prétend une « démocratie majeure » un jeune et éminent professeur de philosophie puisse se retrouver dans un cachot pour avoir tout simplement voulu se prévaloir d’un droit constitutionnel. Qu’on ne nous parle pas de respect des institutions que les tenants du pouvoir, à commencer par leur chef suprême, sont les premiers à dévaloriser ; la Présidence de la République et l’Assemblée nationale n’ont-elles pas désavoué publiquement une décision de la Cour suprême, avec en prime une motion de félicitations et de soutien au ministre rebelle. Le Président de la République
ainsi que le Président de l’Assemblée nationale n’ont-ils pas cautionné la rébellion de Serigne Mbaye Thiam. Quel scandale ! Le Président Macky Sall n’a- t-il pas procédé à la vassalisation de toutes les institutions comme il avait souhaité le faire pour l’opposition. De qui se moque-t-il ? Respect certes, mais pas à l’égard d’institutions ou sévissent le mensonge et la corruption.
La communauté universitaire dans sa globalité doit non seulement s’émouvoir, mais aussi s’offusquer et s’indigner du traitement discriminatoire, humiliant et dégradant infligé à un professeur d’université ainsi qu’à des étudiants qu’on a jetés dans la promiscuité d’ une cellule en compagnie de délinquants de droit commun, alors qu’un grand et dangereux faux monnayeur, défenseur d’un troisième mandat, est isolé dans une chambre disposant de toutes les commodités. Cet état de fait prouve à suffisance le peu de cas que les autorités font du savoir et le manque total de considération à l’endroit des enseignants dispensateurs de connaissances et des étudiants en quête de savoir.
L’aurore d’une ère nouvelle pointera au « TERMINUS 2024 ».
Dakar le 05 Décembre 2019.
Boubacar SADIO Commissaire divisionnaire de police
De classe exceptionnelle à la retraite.