Crash de l’hélicoptère Mi17 à Missirah : trois ans après, les graves révélations d’une enquête qui n’avance pas
Cela a fait trois ans hier que l’aéronef Mi17 de l’armée de l’air s’écrasait dans la zone des mangroves à Missirah, dans la région de Fatick. Un accident qui avait occasionné la mort de 9 personnes dont trois membres de l’équipage et 11 blessés. Un crime resté sans criminel. En effet, suite aux engagements pris par le chef de l’Etat pour faire la lumière sur les circonstances du crash, une enquête a été ouverte, des auditions faites, des défaillances techniques notées, le dossier transmis au procureur de Fatick depuis octobre 2018, mais jusqu’à présent, personne n’a été inquiété. En tout état de cause, des défaillances techniques ont été notées et jamais l’acquéreur de l’appareil, devenu Cemga, n’a été entendu.
14 mars 2018 – 14 mars 2021 ! Trois ans déjà que l’hélicoptère de l’armée de type de Mi17 immatriculé 6WHTA s’était écrasé dans la zone des mangroves, à Missirah, dans la commune de Toubacouta (département de Foundiougne). L’hélico revenait d’une mission sociale (transport d’une dépouille) à Ziguinchor et ralliait Dakar, avec à son bord 20 personnes dont quatre membres d’équipage. Le bilan du crash était lourd : 9 morts dont trois membres de l’équipage et 11 blessés. Il s’agit du colonel El Hadj Mamadou Touré, pilote de l’appareil, du capitaine Emmanuel Sarr, co-pilote et du sergent-chef Thiendella Fall, pilote-mécanicien. Le bilan pouvait être plus lourd n’eut été la perspicacité du colonel Touré, commandant de bord qui s’est sacrifié pour sauver le maximum de civils.
Le capitaine Emmanuel Sarr devait se marierle jour…, Macky avait ordonné une enquête
Suite à cet accident qui avait consterné toute la République, des hommages avaient été rendus aux membres de l’équipage par le chef de l’Etat, lors d’une cérémonie de levée du corps organisée, quatre jours après le crash, à l’Etat-major des Forces armées en présence des familles des disparus, des autorités militaires et du gouvernement. Une journée d’hommages d’autant plus triste qu’elle coïncidait avecle jour où le capitaine Emmanuel Sarr devait se marier. Au terme de la cérémonie, le Président Macky Sall s’était déplacé à l’hôpital Principal pour rendre visite aux rescapés du crash. Parmi eux, l’adjudant Mountaga Sow, seul survivant des membres de l’équipage, qui s’en était tiré avec des blessures graves. Suite à cet accident, le chef de l’Etat avait instruit le gouvernement et le Chef d’état-major général des armées (Cemga) d’alors de mettre en place une commission d’enquête pour faire la lumière sur les circonstances de l’accident qui restent, jusqu’ici, entourées d’un épais voile de mystère.
L’hélico Mi17 était un appareil d’occasion et trainait des défaillances techniques
Rondement menée, il résulte des éléments de l’enquête que l’hélicoptère trainait des défaillances techniques. Tout simplement, parce qu’il s’agissait d’un «aéronef révisé» ; en termes clairs, c’était un hélico d’occasion. En effet, l’enquête a démontré que l’aéronef a été acquis par l’actuel Cemga, en l’occurrence le général Birame Diop, en 2014, alors qu’il était le Chef d’état-major de l’armée de l’air (Cemair). Au moment du crash en mars 2018, il était le chef d’état-major particulier du président de la République (Cempart). Pourtant, invraisemblable que cela puisse paraître, l’ancien Cemair devenu Cempart puis Cemga n’a jamais été…entendu suite à ce terrible accident. Et pourtant, toute la hiérarchie était au courant des défaillances techniques de l’aéronef. En effet, elles étaient souvent pointées du doigt par les pilotes. Pour preuve, avant le crash, l’aéronef était une fois tombé en panne à Saint-Louis alors qu’il transportait le Chef d’état-major général des armées (Cemga) d’alors. L’appareil a d’ailleurs été immobilisé sur place et le retour sur Dakar s’était fait par… voie routière.
Le Pv d’enquête transmis au procureur de Fatick depuis octobre 2018
A la suite de ces défaillances techniques révélées par l’enquête et des différentes enquêtes, le procès-verbal a été transmis depuis octobre 2018 au procureur de Fatick. Mais jusqu’à présent, rien. Le dossier a-t-il été rangé aux oubliettes ? En tout cas, si certains parents de victimes ont été fatalistes devant le triste sort de leurs proches, d’autres, par contre, avaient porté plainte et s’étaient constitués partie civile. En d’autres termes, ils ont souhaité que la lumière soit faite sur ce crash. Ce qui tarde à être fait.
Stop aux appareils d’occasion
Outre les victimes, l’envie de faire la lumière sur cet accident constitue également un cheval de bataille chevauché par des membres de l’armée de l’air dont les cœurs saignent toujours suite à ces pertes douloureuses. Certains n’ont pas manqué de lancer un cri du cœur : «Stop aux appareils d’occasion». Ce, d’autant plus que ce n’était pas la première, ni la dernière fois que ces aéronefs d’occasion faisaient l’objet d’accident. Même si l’enquête sur les raisons du crash du Mi17 piétine, un autre aéronef de type Mi, précisément le Mi35 de fabrication russe, s’est écrasé le 27 septembre 2019 à Bouar, en Centrafrique, alors qu’il revenait d’une mission opérationnelle de la Minusca. Les conditions météorologiques étaient pointées du doigt pour justifier cet accident.
Les vrais secouristes du Mi17 zappés des décorations
Dans ce drame, du crash du Mi17 le 14 mars 2018 à Fatick, les véritables sauveurs des victimes, avant l’arrivée des commandos marins, ont été zappés des décorations du président de la République. En effet, les premiers secours ont été portés par des pêcheurs du village de Bétenti qui, avec leurs moyens rudimentaires – pirogues, gilets, coupe-coupe etc. – ont pu secourir sept personnes avant l’arrivée des commandos marins. Une thèse qui a été confortée par le colonel Abdou Ndiaye. Malheureusement, lorsqu’il s’est agi de décorer les braves secouristes, d’autres qui n’étaient même pas sur le lieu de l’accident ont été décorées à la place des héros. Ce qui avait fait mal à ces derniers qui avaient indexé une liste «purement politisée» pour justifier ces décorations.