Acquisition, réparation et utilisation des voitures administratives : les mesures drastiques de Macky Sall
Rien ne sera plus comme avant dans l’acquisition, l’affectation et l’utilisation des véhicules de l’Etat. Macky Sall a pris un certain nombre de décisions en ce sens, sous forme d’une instruction confidentielle datée du 6 janvier. Le document dont «Les Echos» a copie, note par exemple que les acquisitions se feront selon un programme annuel rigoureusement défini et exécuté par le ministère des Finances. Désormais, chaque bénéficiaire n’aura qu’une seule voiture, en dehors des ministres qui ont une seconde, dite véhicule de servitude. La dotation en carburant ne dépassera plus 500 litres, avec une moyenne de 10 litres par jour. Seuls les chauffeurs de l’administration, surveillés comme du lait sur le feu, sont autorisés à conduire les voitures de l’Etat. Les voitures administratives sont susceptibles d’être immobilisées et mises en fourrière lors d’un contrôle, en cas d’irrégularité grave. Macky Sall invite aussi la police et la gendarmerie à veiller à «un contrôle strict et permanent» de l’utilisation des voitures administratives.
Dans une instruction confidentielle 00112 datée du 6 janvier, adressée aux ministre d’Etat, au ministre secrétaire général de la Présidence de la République, au secrétaire général du gouvernement, aux membres du gouvernement, aux gouverneurs, préfets et sous-préfets, le président de la République a précisé en détail les conditions d’acquisition, d’affectation et d’utilisation des voitures administratives à certaines catégories d’agents de l’Etat. Pour l’acquisition de véhicules, c’est le ministre des Finances qui propose un programme pour chaque gestion budgétaire. Un programme qui ne pourra être exécuté qu’après approbation de la présidence de la République. Avant toute acquisition de voitures, les ministères doivent mettre à jour leurs fichiers de véhicules le 1er novembre de chaque année et exprimer éventuellement leurs besoins en voitures utilitaires.
Et le service en charge du matériel administratif (la Direction du matériel et du transit administratif) prépare chaque année un tableau des marques et types de voitures présentes sur le marché, avec une indication du maximum de renseignements, notamment le référentiel de prix. Un tableau qui sera communiqué à la Direction centrale des marchés publics. Mais celle-ci, selon la directive présidentielle, n’est tenue que d’examiner les achats relatifs aux véhicules utilitaires. Pour la réception des acquisitions, une commission est mise en place avec les experts automobiles de l’Etat désignés par l’agent judiciaire et le représentant de la Dmta. Le procès-verbal de réception, signé par tous les membres, sert de pièce comptable sans laquelle aucune dépense ne peut se faire.
Interdiction aux administrations, sociétés nationales…d’acheter des voitures pour les mettre à la disposition d’une personne, même pour les besoins du service
Selon la directive présidentielle, il est interdit à toutes les administrations, aux collectivités territoriales, aux établissements publics, aux sociétés nationales, au agences, aux autorités indépendantes…d’acquérir une voiture pour la mettre à la disposition d’une personne, pour les besoins du service, à l’exception faite des bénéficiaires des véhicules de fonction autres que les membres du gouvernement. Chaque affectataire a droit à une voiture. Toutefois, les membres du gouvernement ont droit à une seconde voiture dite de servitude, entièrement à leur disposition le long de leurs fonctions. L’affectataire de voiture de fonction doit obligatoirement se rendre au travail avec elle, mais quand les conditions ne le permettent pas, il peut utiliser la seconde voiture.
Les ministres et hautes autorités en Berline de 18 chevaux au maximum et de couleur sombre et discrète
Selon les nouvelles dispositions, les voitures de l’Etat sont classées en trois catégories : les voitures de fonction, les voitures utilitaires et les voitures de servitudes. Les voitures de fonction doivent être de type Berline, avec une puissance maximale de 18 chevaux et de couleur sombre et discrète. Quant aux voitures utilitaires, elles sont d’une puissance maximale de 14 chevaux, avec une apparence sobre. Contrairement aux voitures de fonctions, leurs marques et types ne sont pas définis d’emblée. Ils sont choisis en fonction de l’utilisation envisagée et de la nature du terrain si la voiture est appelée à évoluer hors des voies carrossables. En ce sens, les demandes adressées à la présidence de la République doivent comporter de manière précise des renseignements sur l’utilisation et la zone d’action.
Toutefois, il est envisagé une dérogation à la limitation de chevaux.
En outre, le texte souligne que les voitures administratives doivent être immatriculées dans une série administrative (AD, EP ou série militaire), même si elles sont reçues à titre de dons.
Tout véhicule administratif doit être obligatoirement conduit par un chauffeur de l’administration, avec carte professionnelle ou attestation
Tout véhicule administratif, qu’il soit de fonction ou utilitaire, doit être obligatoirement conduit par un chauffeur de l’administration, en mesure de prouver sa qualité lors des contrôles éventuels. Une carte professionnelle ou une attestation lui est délivrée à cet effet par l’autorité administrative habilitée. La carte où figurent son identité, sa photo… est modifiée en cas de réaffectation du chauffeur et restituée en cas de cessation d’activité.
Désormais, les chauffeurs de l’administration vont être surveillés comme du lait sur le feu. Ainsi, le ministre chargé de la Fonction publique tient un casier disciplinaire des chauffeurs, où sont mentionnés tous les accidents et faits d’indiscipline commis par un chauffeur. La prime annuelle de prudence n’est payée qu’après avis favorable du ministère de la Fonction publique et de l’Agence judiciaire de l’Etat.
Une dotation moyenne de 10 litres de carburant par jour et pas plus de 500 litres pour les voitures de fonction
L’Etat va exercer un contrôle constant sur son parc automobile. En effet, la Dmta et la Direction des transports terrestres tiennent un fichier des véhicules de l’Etat. Un fichier officiel à partir duquel vont être calculées les dotations en carburant et en frais d’entretien. Les différents services concernés doivent faire des rapports annuels sur les paramètres d’exploitation des véhicules et doivent communiquer la situation de leur parc automobile au moment d’une nouvelle demande de voiture. Sans cela, aucune demande ne sera traitée par la commission mise en place à cet effet.
Pour le carburant, la dotation est faite sur la base moyenne de 10 litres par jour. Et ne peuvent être prises en compte que les véhicules qui figurent sur le fichier de la Dmta. La dotation maximale pour les voitures de fonction est de 500 litres. Une dotation supplémentaire forfaitaire de 300 litres est allouée aux membres du gouvernement, pour leur seconde voiture dite de servitudes.
Seuls un chauffeur de l’administration et un chauffeur militaire, sur décision de la Présidence, peuvent conduire les voitures de fonction
La circulation des voitures de l’Etat est soumise également au respect de certaines règles. Un véhicule de fonction n’est autorisé à circuler que s’il est conduit par un chauffeur de l’administration. Toutefois, le parc spécial de la présidence de la République peut mettre un chauffeur militaire à la disposition de chaque ministre affectataire d’un véhicule de fonction. Seuls ces chauffeurs (administratifs et militaires) sont habilités à conduire cette voiture.
Il n’est pas non plus permis de garer une voiture administrative n’importe où. Selon le nouveau décret, elle ne peut en aucun cas être stationnée devant un édifice autre qu’un édifice administratif, exception faite des cas d’organisations de rencontres ou cérémonies dans des édifices non administratifs. Et les bénéficiaires ne passent pas la nuit avec leurs voitures de fonction. A la fin de la journée, le chauffeur reconduit l’affectataire à son domicile et gare ensuite la voiture dans des conditions de sécurité optimale (parking administratif ou tout autre lieu sécurisé).
La voiture de fonction est mise à la disposition exclusive de l’affectataire. Il est muni de macaron sous forme de laisser-passer, apposé sur le pare-brise. Le laisser-passer est affecté à une personne et non à un véhicule.
Les voitures utilitaires dotées obligatoirement de carnet de bord et ne peuvent pas bouger en dehors des jours et heures de travail sans ordre de mission et laisser-passer
En plus des voitures de fonction et celles de servitudes (ces dernières sont dédiées aux ministres), l’utilisation des voitures utilitaires est aussi très surveillée à présent. Elles circulent avec des chauffeurs de l’administration et sous la responsabilité du chef du service auxquelles elles sont rattachées. Contrairement aux voitures de fonctions et celles de servitudes, elles sont obligatoirement dotées d’un carnet de bord. En dehors des jours de service et à la fin de la journée de travail, les voitures utilitaires doivent être garées au parking de l’administration où dans un endroit où la sécurité maximale est garantie.
Et le lieu où le véhicule est garé habituellement doit être indiqué sur le carnet de bord. Si une voiture utilitaire doit sortir en dehors des jours et heures de travail, elle doit être munie d’un ordre de mission et de laisser-passer temporaire. Mais «les ordres de mission ne doivent pas comporter de formules vagues». Il faudra noter l’identité des personnes transportées, l’objet de la mission, les localités à visiter, l’itinéraire et les dates et heures de départ et de retour.
Indemnités compensatrices de 150.000 F Cfa pour l’utilisation de véhicules personnels par des agents sans voitures de service
Certains agents amenés à se déplacer fréquemment et n’ayant pas de voiture administrative peuvent être autorisés par le secrétariat général de la présidence à utiliser leurs voitures personnelles. Cela, après avoir souscrit une police d’assurance couvrant leurs responsabilités personnelles, ainsi qu’à une police d’assurance (de la voiture) en cours de validité. En plus, ils doivent s’engager par écrit à ne recourir en aucun cas à la garantie de l’administration. Le taux d’indemnisation compensatrice est fixé à 150.000 F Cfa net d’impôt, payable que pour les périodes de service et d’utilisation effective du véhicule.
Des sanctions administratives et pécuniaires en sus des sanctions pénales
Le nouveau décret prévoit aussi des sanctions. Toute infraction à la réglementation sur l’utilisation des voitures de l’Etat doit entrainer obligatoirement des sanctions adaptées et rigoureuses. Le véhicule se trouvant dans une situation irrégulière grave peut être immobilisé et mis en fourrière ; et la mainlevée n’intervient qu’après communication de la sanction au secrétariat de la présidence.
Les agents fautifs font l’objet de sanctions administratives, sans préjudice des sanctions pécuniaires qu’ils peuvent subir, notamment des frais de gardiennage en fourrière ou de carburant et d’entretien, et la suppression de l’indemnité compensatrice pour les contrevenants bénéficiaires.
Pour les accidents, tout chauffeur dont la responsabilité est engagée, en dehors des sanctions pénales, aura des sanctions administratives et le cas échant une sanction pécuniaire.
En outre, le décret précise que les voitures administratives «TT» et «It» ne doivent pas être immobilisées en cas de contrôle routier. Et que les irrégularités constatées doivent être notées sur Pv et transmises aux autorités compétentes.
La police et la gendarmerie invitées à veiller à «un contrôle strict et permanent de l’utilisation des voitures administratives»
Enfin, l’instruction de Macky Sall note que la police et la gendarmerie sont chargées du contrôle routier et qu’une notice comportant des directives très précises est mise à leur disposition en vue d’un contrôle strict et permanent de l’utilisation des véhicules administratifs.