Élections locales : entre actes préparatoires et révision des textes
Dans le cadre des prochaines échéances électorales, des actes préparatoires aux déclarations de candidatures et aux scrutins ont été pris récemment. Il s’agit notamment, de la publication du décret convoquant le corps électoral, des décrets fixant le nombre de conseillers à élire dans chaque collectivité territoriale ainsi que les arrêtés fixant le modèle de déclaration de candidatures et déterminant le nombre d’électeurs soutenant les listes indépendantes.
J’ose croire que la répartition des sièges supplémentaires aux communes constitutives de la ville de Dakar est conforme au principe posé par le code électoral en ce qu’il doit prendre en compte le poids démographique.
Si ces actes ne sont pas attaqués, on s’acheminera tout droit vers la tenue des élections départementales et municipales le 23 janvier 2022 après moultes reports.
Les paradoxes sont légion au Sénégal.
Les acteurs politiques et de la société civile ne se sont pas offusqués de la non disponibilité des ces actes officiels qu’à pâtir de jours du dépôt des candidatures alors que les entités indépendantes devront recueillir des signatures d’électeurs pour pouvoir valablement se présenter aux élections (exemple : 13 000 signatures pour la ville de Dakar). La réforme constitutionnelle de 2016, modification l’article 4 de la Constitution, semble méconnue.
Il en est de même de l’esprit de l’article 102 de la même loi fondamentale qui a initiatialement posé le principe de la Participation citoyenne. Force est d’admettre que les conditions de participation des entités indépendantes sont contraignantes (caution, parrainages) bien que celles-ci se sont mis à les surmonter ou simplement les contourner.
Il y a souvent une grande confusion dans le sens des types de consultations. Il n’est pas rare de voir, au cours des référendums sur la révision constitutionnelle, la classe politique voter pour ou contre le président de la République même lorsque des réformes institutionnelles sont initiées.
Mais peut-il en être autrement ?
Lorsque le président de la République qui, en vertu du principe constitutionnel, n’est membre d’aucune Assemblée (nationale ou territoriale), mais s’occupe des investitures des candidats dans les 553 communes, 5 villes et 43 départements. Il veut choisir ses maires et présidents de conseil départemental.
Dans un passé récents, des ministres de l’Intérieur, chargés des élections, ont font acte de candidature et sont devenus maires.
Le directeur général de la Caisse de Dépôt et de Consignation (CDC), habilité par la loi électorale à recueillir la caution versée par chaque liste de candidatures, est lui-même dans la compétition.
Sous ce rapport, il y a lieu de revoir les dispositions sur les inéligibilités et incompatibilités en renouant avec la situation d’avant 2009 où le code électoral énoncait l’inéligibilité des directeurs des établissements publics ou des sociétés nationales aux élections locales.
La révision du Code général des Collectivités territoriales (CGCT) annoncée lors du dernier Conseil des ministres est salutaire.
Toutefois, le code électoral ne régle pas le cas de retrait ou de la démission de la tête de liste élue maire avant l’installation des conseillers territoriaux nouvellement élus, il ne prévoit pas non plus le remplacement du candidat élu à la fois, maire de ville et d’une commune constitutive ou même président de Conseil départemental.
Au regard de l’esprit qui sous-tend l’élection du chef de l’exécutif territorial, il est illogique de donner la possibilité au candidat d’être dans ces différentes positions et de devoir opter en cas de son élection pour l’une des fonctions en vertu des dispositions du CGCT en vigueur.
En conséquence, ces incohérences détourneraient le suffrage des citoyens électeurs, notamment en cas de remplacement d’un maire démissionnaire par le collège des conseillers et par le biais du suffrage universel indirect.
Dès lors, il serait judicieux d’envisager la réactualisation de la loi de 1996 sur le cumul des mandats et de certaines fonctions de sorte que nul ne puisse plus occuper les fonctions de président d’une institution de la République ou de ministre et en même temps celles de président de Conseil départemental.
Par ailleurs, l’effigie de la tête liste sur le bulletin de vote refusée par certains acteurs, malgré le nouveau mode d’élection, reste une incongruité…
Ndiaga SYLLA, Expert électoral
Directeur Général du Cabinet CEELECT.