Bus, Sexe, Vol : Dans l’univers des transports en commun dakarois
©Klinfos.com- Dimanche 27 Mai 2018 – Pour les usagers de la société de transport en commun «Dakar Dém Dik», pour rallier Dakar à Keur Massar (Banlieue), il n y a pas mieux que la ligne numéro 227. Mais pour une aussi longue distance, la cohabitation le temps d’un trajet n’est pas chose facile. En plus d’un bus en surcharge avec un nombre pléthorique dépassant de loin la norme, le vol et les abus sexuels, les insultes et autres écarts sont devenus choses courantes. Les minibus communément appelé TATA non plus n’échappent pas à ce phénomène tout simplement perverses. REPORTAGE.
Au terminus Dakar Dem Dik situé aux Parcelles assainies, le bruit des moteurs des bus assure l’ambiance des lieux en cette période estivale où la chaleur a atteint son summum. A l’entrée et à gauche de cet endroit, est aménagé un abribus où une longue file de personnes attend le prochain bus qui doit les conduire dans leurs destinations respectives. Ils sont de Pikine, de Yeumbeul, de Malika ou encore de Keur Massar à avoir choisi cette ligne pour aller au travail ou tout simplement pour rentrer à la maison le soir.
Apres un long temps d’attente, un des bus devant assurer le trajet se met devant l’abribus où étaient installés les passagers. Par ordre d’arrivée, des hommes et des femmes, des adolescents comme des personnes plus âgées remplissent l’autocar. Les places assises étant toutes occupées, nous nous mettons debout à coté d’une des ouvertures de l’autobus attendant que le receveur vienne occuper sa petite «case» pour permettre aux uns et aux autres de se procurer le précieux sésame devant leur assurer la tranquillité le long du trajet.
LE CASSE-TETE DE LA MONNAIE DANS LES BUS
Alors que le moteur du bus commence à ronronner, le jeune homme, chargé de la vente des tickets entre dans cette grande voiture, sacoche autour du cou et s’engouffre très rapidement dans sa «cellule». Il sait qu’il a juste le temps de bien s’asseoir avant d’être assailli par les voyageurs. Pour éviter de perdre leur place assise qui les obligerait à se tenir debout le long d’un trajet de plus d’une heure, les clients qui ont réussi à se procurer une place, évitent de bouger et envoient par personnes interposées aux gens restés debout leur acheter le ticket. Les plus organisés ont cherché la monnaie avant de monter dans le bus; mais pas tous. Se pose alors l’éternel problème de monnaie entre les receveurs de bus et les clients.
Dans son «fauteuil» en plastique, Arame, une dame de teint clair envoie un billet de 2000 Fcfa pour un seul ticket de 250 Fcfa. Ce qui mettra le jeune receveur dans tous ses états. «Comment voulez-vous que je trouve la monnaie pour 250 Fcfa sur 2000 Francs. En tout cas, je n’ai pas la monnaie. A toi de voir : soit tu cherches la monnaie, soit tu descends et attends le prochain bus», lui martèle le receveur.
UNE FILLE ACCUSE LES HOMMES DE VOL ET D’ATTOUCHEMENT SEXUEL
Quelque temps après, une jeune fille en jean et body, sac à la main, vient se mettre à nos cotés. Elle s’appelle Astou et se rend à Keur Massar. Elle est femme de ménage et habite le village de Mbam dans le département de Foundiougne. Apres de brèves présentations, nous essayons d’entamer une discussion avec elle.
Au début, la demoiselle n’était pas intéressée par le débat. Mais quand on lui demande si elle a une fois été témoin d’une scène d’abus sexuel dans un bus comme le prétendent certaines filles, sa réponse ne tarde pas : «bien sûr que j’en ai vu. Dans ces bus, on ne peut pas rester trois jours sans assister à de pareilles situations. Les hommes sont devenus trop mauvais. Car non seulement ils ne cèdent plus la place aux filles encore moins aux vieilles femmes, mais ils se permettent de profiter d’un trajet pour nous violer de n’importe quelle manière».
LES HOMMES ACCUSENT LES FEMMES ET LEUR REJETTENT LA RESPONSABILITE
El hadji, un jeune mécanicien qui n’était pas loin de nous, s’invite d’un coup dans la discussion. Il voulait apporter la réplique à Astou.
Habillé d’un jean noir avec des déchirures et d’un Lacoste Polo colorié en noire sans doute par l’huile des moteurs de voitures, l’homme explique que ce sont les filles qui sont à l’origine de toutes ces mauvaises choses qui se passent dans les bus. «C’est de leurs fautes, car non seulement elles ne s’habillent plus correctement mais les filles d’aujourd’hui passent leur temps à provoquer les hommes et quand ceux-ci répondent, elles crient au scandale pour jeter la honte sur les garçons. Il arrive même des fois où ce sont elles qui viennent poser leurs fesses sur les ceintures des hommes. Tu comprends qu’en de pareilles situations, en tant qu’homme, on ne peut rien faire d’autre que réagir».
El hadji révèle que lui aussi a assisté à de telles scènes mais à chaque fois il prend la défense de l’homme. «Il y a de cela trois semaines, j’ai été témoin, dans ce même bus d’ailleurs, d’une telle situation. Une fille a crié brusquement pour insulter un jeune homme qu’elle a accusé d’avoir éjaculé sur son pantalon. Mais la remarque que tout le monde a faite est que le gars était derrière la fille depuis que le bus a quitté le terminus et elle a attendu qu’on arrive à Pikine pour dire que le gars lui faisait des attouchements. Vous voyez que ce sont elles qui manigancent tout et reviennent pour crier au scandale. C’est pourquoi ce jour-là, nous avons tous pris la défense du gars qu’on avait caché entre nous avant qu’il ne descende chez lui à Yeumbeul».
«Faux», rétorque Astou. Pour elle, il n’y a pas de doute que les filles sont toujours les victimes dans ces histoires. «Je prends ce bus depuis bientôt trois ans pour rallier Keur Massar aux Parcelles pour des obligations professionnelles. Mais durant ces trois années, j’ai vu du tout dans ces bus et ce sont toujours les hommes qui sont à l’origine des histoires de sexe. Il y a même très souvent des histoires de vol d’argent ou de téléphone portable. Il y a moins d’une semaine, on a volé le portable de mon amie et ce n’était pas la première fois. Moi même j’en ai été victime à plusieurs reprises. Il m’est même arrivé de perdre de l’argent dans un bus. Et tout cela, ce sont les hommes qui le font puisque les femmes n’ont pas l’audace de faire cela».
Après plus de trente minutes de route, nous voilà à Pikine. Des passagers qui attendaient à un arrêt-bus se précipitent pour entrer dans le véhicule, explosant ainsi le nombre de voyageurs déjà excessifs. Mais comme il n’y a personne pour régulariser les choses, le chauffeur s’est dirigé vers eux avant d’ouvrir les portes pour leur permettre de monter dans le car. Il a fallu cinq bonnes minutes avant que les portes ne se referment afin de continuer le trajet. Dans le bus, il faisait une chaleur accablante. C’était insupportable. Cette montée de la température va causer un arrêt de la discussion. Les uns et les autres cherchant à avoir une bonne place pour pouvoir bien respirer mais aussi pour éviter de se faire soustraire leurs téléphones ou encore le peu d’argent qu’ils ont en poche.
UNE FEMME TEMOIGNE
C’est le moment choisi par Astou pour relancer le débat : «Tu vois, les personnes qui connaissent bien ce trajet font très attention parce qu’elles savent qu’il suffit d’un clin d’œil pour se faire dépouiller». Et comme pour confirmer les propos d’Astou, Madame Bâ, la quarantaine s’invite elle aussi au débat. Dans son grand boubou ’’Ganila’’ aux plis très remarquables, la dame qui se tenait debout, la main s’agrippant à une barre de fer explique. «De nos jours, les voleurs ont changé de manière de faire. Auparavant, c’était dans les maisons et les rues des quartiers mais maintenant ils ont fait des bus leur lieu de travail. Presque chaque jour j’assiste à des scènes de vol ou d’attouchements sexuels surtout dans les TATA. La semaine passée, j’ai pris le minibus TATA 70 pour aller à Guédiawaye, rendre visite à ma belle famille mais quand je suis arrivée à destination j’ai remarqué que mon portefeuille a été volé», révèle-t-elle.
La dame explique que c’est pour cela que désormais, quand elle monte dans un bus, elle prend des précautions pour ne pas encore subir les actes de ces voleurs.
Apres plus de deux heures de temps de route, nous voilà arrivés enfin à Keur Massar. Tout le monde descend ou presque. Il ne restait plus dans le bus que les quelques voyageurs qui habitent aux environs du terminus sis à Keur Massar Village. Quelques minutes avant, El hadji était descendu pour rejoindre son domicile à Malika.
Sidy Djimby NDAO
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