Carnet de voyage : le delta du Sine-Saloum, le Sénégal au fil de l’eau


Il y a tant de beaux paysages à voir au Sénégal, mais pour ce premier voyage en terre Téranga nous nous sommes focalisés sur l’une des plus belles régions : le delta du Siné Saloum !
Le Siné Saloum, un nom qui laisse rêveur. Un dédale d’îles et de bras de mer qui forme ce labyrinthe paisible niché au-dessus de la Gambie sur la côte maritime du Sénégal. Pendant cinq jours mangroves, palétuviers, charrettes et randonnées dans la brousse ont ponctué ce voyage en terres sénégalaises. J’ai ouvert ce chapitre d’un tout nouveau genre avec tous nos conseils pour préparer au mieux votre première découverte de l’Afrique Suhsaharienne ; voici maintenant le récit jour par jour. Plongez avec nous au cœur du delta du Siné Saloum.
*voyage réalisé du 27 mars au 04 avril 2018


Carnet de voyage au Sénégal — 5 jours dans le Siné Saloum
Notre pirogue, celle qui nous suivrait pendant ces prochains jour et Elage notre piroguier, nous attendaient à Ndangane. La navigation commença sous un soleil de plomb. Heureusement qu’Elage nous avait installé un drap de fortune pour nous protéger de ce soleil éreintant. Je ne sais pas combien de mile marin nous ferons jusqu’à l’île aux oiseaux où ces pilotis nous attendent. Visions paradisiaques. Nous observerons différentes espèces d’où le nom m’échappe aujourd’hui (hormis le Héron goliath et le garde bœuf, les aigrettes, les pélicans, des sternes, des martins chasseurs, merci Benjamin pour ces termes techniques ! ). Je me souviens de notre premier Yassa crevettes que nous avons partagé à quatre. Le temps file vite sur l’eau, on se laisse bercer volontiers de gauche à droite comme les aiguilles d’une boussole. Nous arriverons à Mar Fafako où champs d’arachide et de mil sont un visage familier et viennent enrober le campement Essamaye, notre maison à impluvium pour les deux prochaines nuits.
Le lendemain, alors que les charrettes nous doublent d’un air curieux et amusé, nous marcherons quelques heures à travers la brousse. L’air est déjà chaud, moite, les zones d’ombre se font rares. Comme des trésors qu’on se met à chercher. L’arrivée à Mar Fafako, le village, sonne nos premières rencontres intimes. Celles où nous avons pu rentrer chez les gens et partager un peu de leur temps. Le médecin du village nous a fait l’honneur de visiter le dispensaire. D’une charrette à quelques kilomètres à pieds, nous traverserons successivement Mar Souloum puis Mar Lodge.


Les moquées des petits villages du Siné Saloum sont si nombreuses. Et ponctuent les angles de ruelles.
Au petit matin, alors que le soleil berce l’eau salée du Siné Saloum et que le soleil est encore bas, fermez les yeux. Il n’y a plus que le moteur de la pirogue et quelques sifflotements d’oiseaux qui font écho. On approche d’un port, l’odeur ne peut plus nous trahir. Ça s’agite, se bouscule. Les moteurs des pirogues rugissent frénétiquement tels de vieilles bécanes qui veulent encore faire leur preuve. Quelques instants d’euphorie avant le départ de course. Les enfants pataugent dans l’eau stagnante. Les femmes marchandes en maître. Les étals de poissons sont beaux, chacun y met de son originalité. Des mises en scènes soignées. De notre barque, à quelques mètres de cette agitation, j’imagine la couleur vive des rougets. Les mouettes s’agitent comme des rapaces. Tout le monde est là. C’est là qu’il faut être. Bienvenue au marché de poisson de Djiffer.
Ô Djiffer
♡
Nous accosterons ensuite sur l’île de Dionouar pour rejoindre tranquillement et quelques heures plus tard le village de Niodior. Des femmes me complimentent sur les motifs de mon kimono, les enfants nous appellent toubab et réclament quelques photos. Ce sont toujours autant d’émotion, et même au bout du 20ème enfant, que de les regarder se toucher le visage après avoir contempler leur reflet. On déambule de ruelles en ruelles, si Niodor est plus grande (et donc plus polluée), le plan du village est toujours le même. Il y a d’abord cette terre battue, ses murs de briques pas tout à fait droit, ni terminé, ce linge coloré, ces tissus de wax qui pendent aux cordes à linge. Quelques demoiselles qui se promènent saut sur la tête. Et ce toubab qui résonne dans le fond des baraques.
Comme un petit air des Caraïbes !
Nous quitterons l’agitation de Niodor pour rejoindre l’un des bras du Siné Saloum. Le choc sonore est toujours impressionnant. Alors que nous n’avons fait que quelques kilomètres, le calme du delta nous mange à nouveau. Elage nous avait encore gâté avec un pique-nique digne des rois : poisson grillé et mangues. Il n’en fallait pas bien plus pour se régaler. Mais il faut reprendre cette route navigable, ce labyrinthe qui semble se rétrécir sur nous pour atteindre notre prochain objectif : l’aire marine protégée de Bamboung au cœur même du parc national du Delta du Saloum. Nos adieux avec Elage sont durs, un vrai pincement et cette fichue impression de quitter quelqu’un que nous savons pertinemment ne jamais revoir. À l’aube du 31 mars et après avoir pris possession de notre case traditionnelle, la nuit tombera pour laisser apparaître dans les ombres de la lune, quelques phacochères tourner autour du camp. Le cri des hyènes bercera notre seule nuit ici au Campement Keur Bamboug.
Découvrir la mangrove du
Siné Saloum en kayak
Le lendemain, Pape, Benjamin et moi-même quitterons chaussures de randonnée pour naviguer seuls et faire du kayak dans les entrailles de la mangrove. Je ne m’étais jamais imaginé pourvoir faire du kayak au Sénégal. Je me souviens encore de ce bruit intense, celui qui te rappelle la jungle. Ces bras végétaux te rendent prisonnier. Comme de grandes pattes d’aranéides, elles se referment sur nous pour ne plus nous laisser repartir. On s’incline facilement face aux humeurs de la marée. Elle commence d’ailleurs à remonter, il faut alors vite filer. Je ne sais pas où je me trouve, mais je suis à des lieux de ces images du Sénégal qui venaient nourrir mon imaginaire. Je suis loin, très loin même. Il est temps de redescendre sur Terre pour continuer le périple jusqu’à Sipo, où se trouve Fatou Mané, la reine du village. Une autre pirogue nous attend, la dernière du voyage. Je sens déjà mon cœur se déchirer et la nostalgie crier. Derniers instants dans ses bras de mer tentaculaires, derniers reflets d’eau salé immortalisés, derniers instants de sérénité.
Le bruit des mobylettes résonnent au loin dans la brousse. Je m’étonne de l’absence de jonchée de détritus qui ponctuent d’habitude mes pas. C’est normal, nous arrivons aux portes de Dassilamé, le village de Pape et village autoproclamé “plus propre du Sénégal”. Il y a encore beaucoup de travail à accomplir et surtout le besoin du soutient des gouvernements dans cette prise de conscience est indispensable. Mais l’initiative louable. La nuit par vite tomber et au détour du repas, Pape nous lance suite à quelques curiosités de notre part, une idée. Des musiques et chants d’enfants au loin, une fête musulmane et un marabout. Il nous embarque en pleine nuit, éclairée à la lueur de la pleine lune, sur sa mobylette, sans phare, ni casque, ni peur, à travers la brousse. Nous sommes 3 sur sa mob’, de vrais instants d’innocence.
On arrive à ce petit village de Toubacouta, il ferait presque jour tant les lumières sont nombreuses. Les sonos sont tellement mal réglées qu’on en deviendrait sourd. Tout le monde est sur la place centrale, le poumon du village. Les hommes assis ensemble à boire du thé, les femmes dansent et ont sorti leur plus belles robes, les enfants jouent et courent dans les rues symétriques, ces blocs de granite. De fil en aiguille, nous nous retrouverons dans une situation tout aussi exceptionnelle que gênante. Pape nous invite à rentrer chez le Marabout qui va tenir l’office toute la nuit ; c’est un grand honneur. Nous nous saluons tour à tour, et puis 2, 3 enfin 15 hommes rentrent dans la pièce. Il n’y a que 3 canapés, le fauteuil du marabout, quelques corans et affiches religieuses pendues au mur.
L’un des sages d’un village voisin souhaite remercier notre présence. C’est inhabituel de voir deux toubabs, ici, qui plus est lors d’une cérémonie islamique. Notre intérêt les touche et le marabout nous invite à partager le repas avec ses convives. L’absence d’hygiène et d’eau potable ne me fera pas reculer devant ce réel honneur que de partager ce moment intime. Vint le temps de la cérémonie, nous ne resterons pas jusqu’au bout (6 heures du matin, nous les entendions encore) car tous les principes coraniques furent lues en langue Sérère. Et puis après le temps de la curiosité et de l’apprentissage de l’autre, vient le temps du recul.


Notre dernière grand jour au cœur du Siné Saloum se lève. Nous marcherons dans le secteur à la rencontre des acteurs de l’horticulture maraîchère (culture d’oignon, tomate en autre), puis nous partirons découvrir la ville portuaire de Missirah (cette fois-ci Benj aura sa propre mobylette et moi je chevaucherai celle de Pape). Ici se trouve le plus grand baobab du Sénégal et nous y retrouveront encore, ces magnifiques pirogues sénégalaises, qui pour la plupart portent le nom de la femme du pêcheur.
Une dernière douche africaine, avec un saut, qu’il faut déjà quitter ce petit paradis. Les silences prennent la relève du Siné Saloum ; pas un mot dans la voiture. Même Pape, étrangement, n’est pas bavard. Comme lors d’un retour de colonie de vacances, personne ne veut briser ses derniers instants. Jusqu’à la dernière seconde. Sur la route battue, on traverse d’autres villages et je regarde toujours les salons de coiffure d’un air amusé et fasciné. Le retour à la réalité est dur, très dur. Embouteillages, cris, pollution, Dakar se rapproche !
Le delta du Siné Saloum en circuit accompagné
Comme je vous le mentionnais dans notre premier article , nous avions choisi de partir au Sénégal avec Terres d’Aventure et de suivre le circuit organisé joliment appelé Terres Marines du Sénégal. En autonomie le delta du Siné Saloum peut très bien se visiter mais il faudra vous trouver une pirogue, négocier, jouer avec les horaires et humeurs des sénégalais. Seul(e) vous risquez de payer plus cher que ce que vaut le tour ; c’est aussi ça l’Afrique. Aussi, le delta offre énormément d’endroit qui ne seront pas praticables pour les marcheurs et la pirogue est le moyen le plus adapté pour la découverte du Saloum. En passant par une agence et en voyageant avec un guide expert de la région (notre guide Pape est né ici et connaît toutes les îles comme sa poche) c’est beaucoup moins de tracas, d’organisation pour vous et le guide pourra vous enrichir de nouvelles connaissances.
Si l’envie vous dit de voyager avec Terres d’Aventure au Sénégal et de suivre notre parcours, je vous recommande vraiment de demander Pape comme guide (il ne s’occupe pas des circuits qui vont dans le secteur de Saint-Louis) !
Quand on regarde sur une carte du Sénégal notre itinéraire, vous aurez l’impression que nous n’avons rien vu. Au contraire, je n’ai pas eu ce besoin de traverser le pays de long en large et en travers pour découvrir l’âme du Sénégal. Prendre son temps, se reconnecter à la vie ; j’avais besoin de cette pause là. Et le delta du Siné Saloum fut un vrai havre de paix.
Pour voyager jusqu’au Sénégal, nous avons pris la compagnie Corsair qui relie Dakar depuis Paris Orly en vols réguliers.
Sur la route pour rejoindre Dakar, la capitale !
A R E Y O U O N P I N T E R E S T ?
