Politique

Campagne de levée de fonds : les erreurs commises qui ont perdu Ousmane Sonko et Pastef-Les Patriotes

Ousmane Sonko Pastef
Ousmane Sonko lors d’un meeting en France

Le ministre de l’Intérieur, Antoine Felix Diome, dans un communiqué publié le 2 janvier dernier, a menacé de dissoudre le parti Pastef Les Patriotes dirigé par l’opposant Ousmane Sonko, si ce dernier ne se conformait pas à la loi dans le cadre de sa campagne de levée de fonds internationale. Au-delà des passions suscitées par des considérations politiques, force est de constater que Pastef-Les Patriotes a violé la loi. Ce, même si ce n’est pas la première formation politique à l’avoir fait. Mais une loi reste une loi, même si elle a été violée plusieurs fois.

Dans la foulée de sa campagne de collecte de fonds «Nemmeekou Tour», qui a connu un franc succès (le parti ayant obtenu 125 millions alors qu’il n’en cherchait que 50), Pastef-Les Patriotes a reçu les menaces de dissolution de la part du ministre de l’Intérieur, Antoine Felix Diome. En effet, le ministre de l‘Intérieur, qui a considéré qu’une telle opération violait de manière flagrante la loi sénégalaise, a réagi à travers un communiqué aux allures de mise en garde contre les rouge et vert.

«Un message récemment diffusé sur les réseaux sociaux informe d’une campagne de levée de fonds internationale au profit du parti politique dénommé Pastef, pour le financement de ses activités», a indiqué Antoine Felix Diome dans son communiqué, rappelant qu’en vertu de l’article 3 de la loi du 6 mai 1981, relative aux partis politiques, «les partis politiques ne peuvent bénéficier d’autres fonds que ceux provenant des cotisations, dons et legs de leurs membres et sympathisants nationaux et des bénéfices réalisés à l’occasion de manifestations». Suffisant pour mettre les choses à leur place et dire à qui veut l’entendre que «tout parti politique qui reçoit des subsides de l’étranger, ou d’étrangers établis au Sénégal, s’expose à la dissolution, conformément à l’article 4 de la loi de 1981 susmentionnée».

En faisant ainsi, le ministre n’a fait qu’appliquer la loi. Même si, par motivation purement politique, certains ont voulu faire croire que le pouvoir politique chercherait la petite bête à des opposants. Pourtant, dans ce cas de figure spécifique, le pouvoir, s’il n’était motivé que par le désir d’abattre l’opposition, aurait pu laisser Pastef-Les Patriotes violer la loi et sévir contre le parti le moment venu.

En fait, le fait est que Pastef-Les Patriotes a violé la loi. Et comme bien d’autres partis avant lui, le parti Pastef-Les Patriotes a voulu utiliser la léthargie dans l’application des textes régissant les partis politiques au Sénégal pour lever des fonds à l’international. Mais, si pour les autres, les ministres d’antan avaient choisi de fermer les yeux devant cette violation de la loi, l’actuel ministre de l’Intérieur, Antoine Felix Diome, a lui décidé d’appliquer la loi dans toute sa rigueur.

En effet, aux termes de l’article 3 de la Constitution, les partis politiques sont tenus de respecter la Constitution ainsi que les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie. L’article 2 de la Loi n°89-36 du 12 octobre 1989 modifiant la loi n°81-17 du 6 mai 1981relative aux partis politiques fait d’ailleurs à ces derniers l’obligation de faire figurer cet engagement dans leurs statuts.

Par ailleurs, l’article 4 de la loi n°81-17 du 6 mai 1981 énumère les cas de dissolution des partis politiques qui sont, outre le non-respect de leurs obligations de déclaration et de dépôt de documents et le financement par des subsides reçus de l’étranger, l’application d’une modification statutaire qui n’aurait pas été acceptée par le ministre de l’Intérieur.
La dissolution intervient également dans le cas où un parti a reçu directement ou indirectement des subsides de l’étranger ou d’étrangers établis au Sénégal ; dans le cas où un parti applique une modification statutaire refusée par le ministre de l’Intérieur ou encore dans le cas où, par son activité générale ou ses prises de positions publiques, un parti a gravement méconnu les obligations qui lui incombent, notamment en ce qui concerne le respect des caractères de l’État (républicain, laïc et démocratique) ; des institutions de la République (de leur statut, de leurs pouvoirs et de leurs compétences) ; de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire et de l’unité de l’État et de l’ordre public et des libertés publiques.

«La dissolution est prononcée par décret pris sur le rapport du ministre de l’Intérieur. Les biens d’un parti dissous sont liquidés conformément aux dispositions de ses statuts ou, à défaut, conformément aux dispositions de l’alinéa 2 de l’article 817 du Code des obligations civiles et commerciales», ajoute l’article unique de la loi n°89-36 du 12 octobre 1989 modifiant la loi n°81-17 du 6 mai 1981relative aux partis politiques.

Outre la loi, une levée de fonds internationale obéit à un certain nombre de règles. Et même pour un État, c’est réglementé. En effet, l’autorité a besoin de certaines informations comme la connaissance de la provenance des fonds ou encore l’assurance de la destination des fonds.

L’autre chose qui ne milite pas pour Ousmane Sonko et ses partisans, c’est la période choisie. En effet, alors que la pandémie de coronavirus a fini de mettre bien des familles à terre, avec des Sénégalais de l’extérieur tellement fatigués qu’ils n’envoient plus à leurs familles, c’est peu de dire que le moment choisi par Pastef-Les Patriotes pour demander aux Sénégalais de contribuer est mal choisi.

Sidy Djimby NDAO

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