Santé

Affaire Mamy Doura Diallo : l’Ordre des Médecins tire sur le procureur de Kédougou

Kedougou
Une route de Kédougou

Alors que le procureur de Kédougou a requis l’ouverture d’une information judiciaire et décerné le mandat de dépôt contre les trois agents du centre de santé de la ville après la mort en couches de la dame Mamy Doura Diallo, prenant ainsi le contrepied de l’enquête interne du ministère de la santé, l’Ordre National des Médecins du Sénégal a, une nouvelle fois réagi à cette tragédie. Dans un communiqué dont une copie est parvenue à « Les Echos », l’Ordre National des Médecins du Sénégal soulève des griefs contre la décision du procureur de la République. L’Ordre National des Médecins du Sénégal dénonce la volonté du procureur de la République de passer outre l’expertise des sachants dûment désignés et la violation par ce dernier du respect du principe de la présomption d’innocence et de la mise à contribution du tribunal des pairs.

Au moment où plusieurs syndicats de médecins ont entamé une grève de 48 heures, à compter de hier lundi, protestant contre l’arrestation de trois agents de santé, accusés de « négligence » après le décès de la Mamy Doura Diallo et de son nouveau-né, le 30 août dernier à Kédougou, l’Ordre National des Médecins du Sénégal intervient dans cette affaire qui défraye la chronique depuis les révélations de nos confrères de Libération.

Hier, quand les trois professionnels de la santé, en garde-à-vue durant tout le week-end, ont été placés sous contrôle judiciaire, on espérait que ce desserrement de l’étau autour des prévenus allait calmer les choses. Mais c’était sans compter avec l’Ordre National des Médecins du Sénégal qui est sorti de sa réserve pour souligner des manquements dans la procédure d’arrestation avant de fustiger ce qu’il pourrait comme un abus de pouvoir de la part du procureur.

« L’Ordre National des Médecins du Sénégal a rappelé à Monsieur le Procureur les procédures à respecter dans ces cas notamment, la saisine de l’Ordre pour les besoins d’expertise mais aussi le principe de respect de la présomption d’innocence pour les professionnels concernés ainsi que les particularités de la région de Kédougou et le sacro-saint respect de la continuité des services et du droit des populations à la santé. Ainsi, dès la journée du 1e, Septembre 2022, sur la demande du procureur, l’Onms a désigné trois gynécologues qui ont été entendus sur procès-verbal par des officiers de police judicaire. L’Onms des médecins déplore les insuffisances et les difficultés rencontrées pour mettre à la disposition des prévenus un avocat à partir de Tambacounda ou Kédougou et la violation des droits des prévenus qui n’ont pas été entendus en présence de leur avocat », a noté l’Ordre National des Médecins du Sénégal dans son communiqué.

Poursuivant pour se désoler de la tournure prise par cette affaire « du seul fait de la volonté du Procureur de la République de passer outre l’expertise des sachants dûment désignés », l’Ordre National des Médecins du Sénégal dénonce également la violation par le magistrat instructeur du principe de la présomption d’innocence et de la mise à contribution du tribunal des pairs.

« L’Ordre National des Médecins du Sénégal déplore cette attitude du Procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Kédougou consistant à se substituer à l’expertise des pairs. Cette attitude semble condamner les membres d’un ordre professionnel régis par la Loi avant d’avoir épuisé tous les principes de prudence mettant en danger des populations du fait de la fermeture d’un service de référence dans une zone difficile d’accès en plein hivernage. », dénonce l’Ordre National des Médecins du Sénégal, appelant à « la responsabilité de l’État pour qu’autant de pouvoir placé entre les mains d’un seul individu ne puisse nuire aux efforts déployés depuis nombreuses années pour améliorer la santé des populations… ».

Ceci dit, le regroupement des Médecins du Sénégal demande le respect de la présomption d’innocence en cas de suspicion de manquements dans le cadre des actes médicaux pratiqués dans les formations sanitaires. « L’Ordre National des Médecins du Sénégal espère que les autorités apprendront de la situation de Kédougou pour adapter l’arsenal juridique par le renforcement du tribunal des pairs. », a-t-il ajouté.

Kiné NDIAYE

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