Démocratie

Après la coupure du signal de Walfadjri : Moussa Bocar Thiam officialise le retrait de la licence du groupe

Walfadjri
les supports du groupe Walfadjri

Le gouvernement du Sénégal a pris Dimanche la surprenante décision de couper le signal des antennes télé et radio du groupe de presse Walfadjri, retirant dans la foulée la licence du groupe fondé par le défunt Sidy Lamine Niass et désormais administré par son fils Cheikh Niasse. Hier, alors que le groupe Walfadjri a saisi le ministre de la Communication, des Télécommunications et du Numérique pour demander à ce que leur soit notifié la décision de retrait de leur licence, pour dit-il pouvoir l’attaquer en justice le plus rapidement possible. Quelques temps après, le ministre Moussa Bocar Thiam a notifié au groupe de presse « l’ordonnance portant retrait de la licence de diffusion des programmes groupe Walfadjri ». Dans son document, le ministre reproche au groupe de presse sa « couverture de la situation de tensions politiques notées à Dakar le dimanche 4 février 2024 ». L’autorité dit s’appuyer sur l’article 142 de la loi numéro 2017-27 du 13 juillet 2017.

Dimanche 4 février 2024, alors que le Sénégal devait officiellement entrain en période de campagne électorale pour la présidentielle de 2024, ce sont des manifestations marquées de heurts et de violence qui ont été notées à Dakar et dans l’intérieur du pays. La cause de ce bouleversement, le report sine die de l’élection présidentielle décidé unilatéralement par le président de la République. Comme à chaque fois que des manifestations se tiennent à Dakar et à l’instar de bien des média, le groupe Walfadjri jugé proche de l’opposition interrompue ses programmes pour « montrer aux Sénégalais ce qui se passe dans leur pays et au monde entier ce qui se passe au Sénégal ».

Lors de la diffusion de ces événements, en pleine édition spéciale, un des présentateurs du journal a annoncé que le ministre de la Communication a appelé pour leur demander d’arrêter de montrer ce qui se passe dans les rues de Dakar.

Quelques minutes plus tard, et alors que les dirigeants du groupe ont décidé de poursuivre l’édition spéciale, le signal de Walfadjri a été coupé sur décision du ministre de la Communication, des Télécommunications et du Numérique, Moussa Bocar Thiam. Seulement malgré cette coupure de son signal, la diffusion des programmes se poursuit sur la chaîne YouTube du groupe où beaucoup d’autorités appellent pour exprimer leur solidarité, mais aussi fustiger l’attitude du ministre de tutelle pour un groupe qui fait du service public. C’est le moment qu’a choisi Moussa Bocar Thiam pour porter l’estocade au groupe fondé en 1984 par feu Sidy Lamine Niass, en décidant du « retrait définitif de la licence du groupe Walfadjri ».

Hier, alors que le groupe Walfadjri a saisi le ministre de la Communication, des Télécommunications et du Numérique pour demander à ce que leur soit notifié la décision de retrait de leur licence pour pouvoir l’attaquer en justice dans les plus brefs délais. Quelques heures seulement après la lettre de Walfadjri, le ministre Moussa Bocar Thiam a notifié au groupe de presse « l’ordonnance portant retrait de la licence de diffusion des programmes groupe Walfadjri ». Dans sa décision, le ministre reproche au groupe de presse sa « couverture de la situation de tensions politiques notées à Dakar le dimanche 4 février 2024 ».

« Alerte : le Monstre vient de nous délivrer le certificat de décès de Walf. Levée du corps ce vendredi à 15h devant les locaux du Groupe pour en finir définitivement avec ces tyrans. Vivement la révolution », a réagi à ce sujet le groupe Walfadjri sur son compte X (ex Twitter).

Le ministre de la Communication, des Télécommunications et du Numérique assure dans sa décision qu’il s’est s’appuyé sur l’article 142 de la loi numéro 2017-27 du 13 juillet 2017.

« Les propos haineux et subversifs sont d’autant plus préoccupants qu’ils sont portés par des Journalistes et certains se disant chroniqueurs sans aucune retenue ni pondération encore moins un équilibre. Pendant trois heures des appels incessants au soulèvement violent de la population ont été relayé à l’édition spéciale animée par des journalistes et même par le Président Directeur Général du groupe Cheikh Niass qui appelle le peuple à combattre dans la rue tout en traitant le président Macky Sall de ‘´monstre’´ », regrette le ministre de la communication Me Moussa Bocar Thiam.

WALFADJRI APPELLE À LA MOBILISATION

Décidant de ne pas baisser les bras face à cette décision du gouvernement du Sénégal, Walfadjri a décidé d’appeler à « la mobilisation de tous les démocrates ». Le groupe de presse a adressé une lettre au préfet de Dakar pour l’organisation d’un sit-in à partir de vendredi.

« Nous venons auprès de votre bienveillance vous informer que nous avons décidé de faire un sit-in devant les locaux du Groupe Walfadjri sise à Khar Yalla, le vendredi 9, samedi 10 et dimanche 11, février 2024 de 15h à 19h pour protester contre la coupure de notre signal du 04 février 2024 », lit-on sur la note.

Reporters sans frontières (RSF), dans un communiqué publié hier demande aux autorités de garantir le droit à l’information et la sécurité des journalistes.

« Au Sénégal, les journalistes sont fréquemment victimes d’arrestations – une douzaine ont été arrêtés dans l’exercice de leur fonction entre juillet 2022 et août 2023 – et d’attaques, venant tant des forces de sécurité que des acteurs politiques ou de leurs soutiens. Les abus de pouvoir se sont également multipliés, avec notamment une première suspension du signal de Walf TV en juin 2023 et des restrictions de l’accès à Internet et aux réseaux sociaux. », note RSF dans son communiqué.

A travers une déclaration conjointe Amnesty International Sénégal, Article 19 Sénégal et Afrique de l’Ouest, la Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDHO), Ligue Sénégalaise des Droits Humains (LSDH) et AfricTiviste dénoncent le retrait de la licence de la chaîne de télévision Walfadjri.

« Nous, soussignés, exprimons notre profonde préoccupation face à la décision des autorités sénégalaises de retirer la licence de la chaîne de télévision Walf TV, en raison d’une prétendue incitation à la violence. Nous considérons cette mesure comme disproportionnée et contraire aux normes et standards internationaux en matière de liberté d’expression et de presse. La liberté de la presse est un pilier fondamental de toute démocratie, garantissant la pluralité et la diversité des médias. Nous appelons le gouvernement sénégalais à reconsidérer cette mesure de retrait de licence de Walf TV et à respecter les principes qui sous-tendent la liberté d’expression. », notent les organisations signataires.

Rappelant que l’État a la responsabilité de faciliter l’accès à l’information et de tolérer la diffusion de toute information, activité et communication publique liées aux événements politiques, notamment les élections, ces organisations assurent la répression d’un média qui couvre un événement public constitue une menace sérieuse pour la liberté de la presse.

Le retrait de la licence de Walf TV risque de créer un climat d’autocensure parmi les médias, par crainte de représailles.

« Une presse libre et indépendante est essentielle pour cimenter les fondements de la démocratie. Nous exhortons le gouvernement sénégalais à réévaluer cette mesure afin de garantir un environnement médiatique diversifié et ouvert. Les médias jouent un rôle crucial dans la représentation de la diversité des opinions des citoyens et des acteurs politiques. La tolérance et la diversité des opinions dans l’espace public sont des éléments clés d’une société démocratique. Nous encourageons le gouvernement sénégalais à favoriser un environnement médiatique où la pluralité des voix est respectée et protégée. », disent-ils encore.

Avant d’ajouter : « Nous exhortons le gouvernement sénégalais à réaffirmer son engagement envers la liberté de la presse, à garantir la diversité des médias et à respecter les normes internationales en matière de liberté d’expression. La préservation de ces principes est essentielle pour le renforcement de la démocratie au Sénégal. »

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