Contribution

Lettre Ouverte à Son Excellence M. Bassirou Diomaye Diakhar Faye, Président de la République du Sénégal – Par Amadou Siga Faye

Bassirou Diomaye Diakhar Faye - Amadou Siga Faye
Bassirou Diomaye Diakhar Faye - Amadou Siga Faye

Votre Excellence, qu’il me soit d’abord permis de vous adresser mes plus vives félicitations pour votre assez éclatante victoire au soir du scrutin présidentiel

La maturité, la clairvoyance et la sagesse du peuple sénégalais fait inéluctablement tache d’huile sur la mémoire collective contemporaine autant en Afrique que dans le monde.

Il a, le 24 mars passé, fait le choix de la rupture en choisissant le candidat qui incarnait le mieux cette rupture: en votre personne, plébiscite du président Ousmane Sonko et de votre parti le PASTEF.
Cependant, malgré son choix mature il n’en demeure pas moins qu’il ne prend pas toutes les mesures de son choix. Lequel implique une plus grande part  » d’abandon de soi pour la patrie ».

Le Sénégal de nos rêves n’est certes pas un pays où ceux qui occupent des postes de responsabilité s’enrichissent sur le dos déjà assez écrasé des Sénégalais. Il n’en est pas plus un pays où l’on combat des injustices en en créant d’autres, surtout pas de plus cancérigènes.

Nous espérons certes un pays où la vie n’est pas chère où le pouvoir d’achat est décent bref, un pays où la croissance et l’émergence s’inviteront dans les plats des Sénégalais.Un pays où les richesses seront équitablement redistribuées. Un pays où les bateaux de fortune qui prendraient le sens inverse de la Méditéranée à la recherche d’un pays devenu Eldorado, se heurteront à l’humanité et à l’hospitalité rationalisées de nos plages.

Seulement, pour que notre Sénégal devienne ce pays dont nous rêvons tous – vous davantage depuis le 02 avril – , il faudra, exactement, ce qu’il a fallu aux pays qui se sont construits et au moment même où ils se construisaient. Le Sénégal, quoiqu’il nous soit cher et inestimable et qu’il ait fait le choix d’une dynamique augurant de meilleurs lendemains, ne fera pas l’exception.
Si l’heure des massacres révolutionnaires et arbitraires est dépassée, tout effort de développement appellera aux sacrifices illimités, aux abnégations, consenties ou imposées, de toute une génération pour le bien-être des générations à venir et pour leur seul bien-être.

Ce sacrifice, il faudra s’en résoudre, n’est pas possible dans un pays où, au nom de la liberté d’expression , l’espace et le débat publics sont pollués de maldires et de tropdires.
En effet, votre élan de protection des « activistes » ne doit pas prêter à des déclarations insultantes et ostentatoires, à un populisme qui pervertit la langue du peuple à force d’investir ses oreilles, à des campagnes personnifiées de dénigrement et de manipulation de leur part. Sauf si, bien évidemment, vous consentez à prouver une fois de plus que « celui qui triomphe par les armes, périra par les armes ».

Il ne le sera pas davantage dans un pays où au nom d’autres libertés universalisantes, d’ autres évidences inoculées ou d’ autres mentalités empruntées, le peuple se perd définitivement en perdant ses racines, ses prédispositions et ainsi toutes ses chances au grand rendez-vous du concours de nations enracinées d’abord et ouvertes par suite.

Le changement choisi par le peuple sénégalais et dont vous êtes le porte-étandard ne se fera pas dans la complaisance et la peur des sensibilités, il ne se fera pas non plus dans la préservation du climat social actuel, encore moins dans une démarche qui emploie plus d’éfforts pour la réedition des comptes que pour la réconcialiation nécessaire des Sénégalais.

Monsieur le Président de la République, il faut réconcilier le Sénégal avec lui-même par un rétablissement de notre propre conscience historique et culturelle. Et, les Sénégalais avec eux-mêmes par le dépassement clinique de nos clivages et notre commune mobilisation pour les seuls efforts de reconstruction nationale et africaine.

Presque tous s’accordent à vous donner le temps de vos preuves, je n’en serais pas moins convaincu, si l’accord de ce temps n’impliquait pas de taire les suggestions que votre démarche inspire et qui pourront l’améliorer ainsi que vos résultats pour le bien-être des Sénégalais.
C’est pourquoi le simple citoyen que je suis, le Sénégalais qui a été victime de la violence « légitime » qui a servi de répression à votre combat politique à Bignona en mars 2021 et la voix qui, malgré ses objections à votre « projet » a parcouru plus de trois cents kilomètres pour participer à votre élection, s’autorise aujourd’hui et pas quand ( qu’ Allah nous en préserve) vous aurez trébuché, à vous adresser quelques modestes suggestions comme sa contribution à l’effort de changement. (Non qu’il en fût autrement plus haut)

D’abord, je vous invite, votre excellence, à bien vouloir éviter de commettre l’erreur de l’intellectualisme ou de la reproduction du modèle de travail français. Toutefois, la performance du système américain tient à la primauté de la compétence sur le diplôme. Tel que consacré par notre système éducatif calqué sur un modèle identique, le diplôme n’est qu’une présomption de compétences et celles et ceux qui n’en n’ont pas peuvent dans bien de cas prouver leur compétence. Je vous demanderai de bien vouloir y prêter attention.

D ‘autant plus que votre prédécesseur a fait montre du même intellectualisme dans les compositions de ces différents gouvernements. Depuis la toute première jusqu’à la dernière où les deux seules « fractures » se trouvaient à l’Intérieur et à la Culture dans la première. Et, qui mieux que vous connait le résultat puisque vous en êtes naturellement le résultat.

Ensuite, je salue à l’instar de tous votre démission du poste de Secrétaire Général du parti ainsi que celles des élus locaux présentement nommés.

Cependant, je vous supplie de ne pas cautionner la confusion entre la République bien public et le PASTEF bien privé. A cet effet, la présence des responsables départementaux du PASTEF lors des passages de Ministres ou de Secrétaires d’Etat ne fait que remettre le clou que vous avez voulu ôter du pied de la République en démissionnant.

J’en veux pour preuve les interviews du Ministre du Transport lors d’un moins récent accident et du Secrétaire d’Etat à l’Urbanisme lors d’une visite de courtoisie.

Je suis par là même convaincu qu’on ne puisse dissocier le politique et l’administratif en la personne d’un Ministre . Seulement, à défaut de pouvoir pour cause de realpolitik satisfaire entièrement aux promesses, prises au pied de la lettre, de rupture; il faudrait tout de même circonscrire et dissocier par le soin du protocole le politique de l’administratif.

Egalement, le Premier Ministre Ousmane Sonko qui a eu la sagesse de démissionner de la Mairie de Ziguinchor reste aux commandes du parti, choix politique et personnel respecté certes. Sauf si cela implique de s’attribuer des missions diplômatiques au nom du parti et non au nom de la République.

Surtout dans des pays où nous autres aurions souhaité vous voir faire vos premiers déplacements diplômatiques par respect au souffle de la libération qu’ils ont insuflé à notre peuple et qui a eu l’occasion de l’opérer autrement que par la rue et les coups d’Etat. Au Mali, au Burkina Faso particulièrement c’est le Sénégal qui leur doit une reconnaissance en développant avec eux et avec les trois premiers pays que vous avez visité mais pas seulement une forme aboutie d’intégration. Ce n’est pas un espace à conquérir par le PASTEF pour des calculs politiques dont on tait encore le nom. C’ est à la République de s’y rendre pour affiner et rendre meilleur le processus qu’ils ont enclenché pour le bien-être des populations africaines. Veillez à ne pas installer ce bicéphalisme anodin et anti-républicain entre la Patrie et le parti.

Aujourd’hui comme jamais auparavant, c’est le peuple africain du Sahel qui appelle à la libération et à l’intégration et les leçons tirées des échecs d’intégration passés ou récents devront inéluctablement inviter l’élite à faire le choix similaire d’un panafricanisme radical qui tende à former une ou des Fédérations d’Etats qui auront réussi à ne faire qu’Un, à agréger leurs potentialités comme à l’époque des grands Empires mais cette fois-ci par le biais d’une consultation transnationale transparente et démocratique.

Votre Excellence, très cher grand frère, le Sénégal a , à travers votre personne, l’occasion de se refaire et d’éviter de se défaire et le seul vrai préalable, par lequel je termine enfin, est une révolution culturelle qui sache régénérer un modèle de citoyen disposé et non soumis, averti et non téméraire, épris davantage de l’autre que de lui-même et pour ainsi servir de trépieds aux changements économiques, politiques et sociales tant espérés.

Convaincu de la primauté de cette révolution culturelle, de la nécessité de la réconciliation nationale et de l’impératif de formes poussées d’intégration, interpelé par notre devoir civique de participation à la gestion publique, nous osons nous proposer en mouvance de contribution pour le changement substantiel et existentiel de notre cher Sénégal.

Monsieur le Président, Votre Excellence, je vous prie de bien vouloir agréer l’expression de mes sentiments les plus distingués ainsi que mes prières les plus ardentes pour la réussite de votre mission qui engage l’avenir de notre très chère Nation.

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