Cinq mois après la présidentielle, les Sénégalais ont de grands espoirs pour leur président
Les citoyens affirment que le plus jeune président du pays a fait preuve de transparence et de célérité dans ses politiques, mais il reste encore des questions importantes à régler.
La période électorale au Sénégal cette année a été un test majeur pour la démocratie et les libertés civiles du pays. Les reports ayant conduit à des manifestations, puis à des arrestations et à davantage de troubles, les Sénégalais étaient en conflit avec leur droit de choisir pacifiquement et librement leurs prochains dirigeants, tout en écartant toute possibilité de prolongation du mandat de l’ancien président Macky Sall.
Après des semaines d’incertitude et une nouvelle date d’élection, les élections ont donné naissance au plus jeune président de l’histoire du pays – Bassirou Diomaye Faye, un ancien inspecteur des impôts et un homme politique franc. À l’approche des élections, Faye était en détention, accusé de diffusion de fausses nouvelles et de diffamation d’un organe constitué en réponse à un message qu’il avait publié sur Facebook accusant Sall d’empiéter sur les droits judiciaires. Bien que peu connu, la détention et l’émergence ultérieure de Faye en tant que candidat, soutenu par Ousmane Sonko, alors connu de l’opposition, ont fait de lui une figure fascinante de la politique africaine.
Mais près de 150 jours après sa prestation de serment, quel genre de président a été Faye et comment le peuple sénégalais a-t-il accueilli sa politique ? Les deux réponses récurrentes reçues par OkayAfrica réitèrent que Faye a tenu parole en démissionnant du PASTEF, son parti politique, après sa prise de fonctions. Il est également resté respectueux des processus juridiques concernant la séparation des pouvoirs. Mais ce n’est pas tout.
Priorité à la paix
Pour Assane Momar Diouf, entrepreneur agroalimentaire de 31 ans, la victoire de Faye a été une victoire bien nécessaire pour le peuple sénégalais qui a été arrêté et détenu pour avoir dénoncé ses propos. Selon Diouf, l’administration de Faye a excellé dans l’instauration de la paix et le renouvellement de la foi dans un gouvernement démocratique exempt d’intimidation.
« Le plus grand acquis du gouvernement Faye depuis son arrivée a été la paix sociale, avec la fin des coupures d’internet et des emprisonnements pour cause de liberté d’expression », explique Diouf à OkayAfrica. « En peu de temps, ils ont réussi à baisser les prix des denrées alimentaires, à rembourser une vieille dette aux agriculteurs et à distribuer des semences et des engrais à ceux qui y ont droit sans aucun détournement de fonds. Les premiers pas vers la reddition de comptes ont été franchis avec la publication des rapports de l’OFNAC (Office national de lutte contre la fraude et la corruption), de la Cour des comptes et la réorganisation de la Haute Cour de justice. »
Ibrahim Ka Ndoye, un spécialiste du marketing numérique de 29 ans, résume les trois derniers mois de l’administration Faye comme étant stables. « Après trois ans d’incertitude, le pays est enfin revenu au calme. Cela a eu un effet positif sur l’économie, qui redémarre. Le tourisme, qui était au ralenti, tourne à plein régime cet été. Le Sénégalais moyen montre également un plus grand intérêt pour les questions politiques », note Ndoye.
La prise de conscience politique est peut-être, selon Ndoye, la plus grande réussite de l’administration Faye. « Les Sénégalais, qui avaient l’habitude de se désintéresser de la politique, sont désormais très attentifs aux décisions du gouvernement. Les communiqués du Conseil des ministres sont scrutés de près, de même que la signature d’accords et de partenariats, ce qui représente une avancée significative dans la construction de notre démocratie. »
Des politiques efficaces
Pour le peuple sénégalais, l’administration Faye a jusqu’à présent réussi à mener à bien des politiques bénéfiques pour le bien-être socio-économique de la population. Les personnes interrogées par OkayAfrica ont noté que le regain d’enthousiasme des ministres pour s’engager auprès des citoyens ordinaires au Sénégal a apporté un nouveau sentiment de proximité et de compréhension des problèmes qui les affligent.
« La journée nationale de nettoyage « Set Setal » est également un grand succès. Son prédécesseur l’avait déjà tentée, mais sans succès. Avec ce nouveau gouvernement, nous assistons à une mobilisation collective des jeunes au début de chaque mois pour nettoyer le pays et développer une citoyenneté active », déclare Ndoye.
« La transparence est également un point de satisfaction. Nous avons un gouvernement qui communique beaucoup (peut-être même un peu trop) avec le public. Les ministres n’hésitent pas à prendre la parole pour démontrer, preuves à l’appui, les résultats de leurs actions et les fondements des différents partenariats entre le gouvernement, les bailleurs de fonds et les partenaires techniques ou financiers. »
La question du chômage
Pourtant, le chômage continue d’être l’un des plus gros problèmes du pays, avec 33 % de la population jeune sans emploi, sans école ou sans formation formelle en 2022.
« Malgré les différentes initiatives des bailleurs de fonds et du gouvernement, le problème demeure. Le problème, à mon avis, c’est que nous cherchons toujours des solutions d’urgence sans vraiment considérer les causes réelles », explique Ndoye. « La réalité est que les jeunes manquent cruellement de compétences. Notre système éducatif ne permet pas aux apprenants d’acquérir des compétences techniques à la fin de leur formation. Par exemple, les élèves abandonnent de plus en plus les matières scientifiques et techniques [au lycée]. Les universités souffrent d’une surpopulation croissante, ce qui n’est pas propice au développement des talents car les enseignants sont débordés. »
Il y a aussi la question de l’immigration clandestine, une source de préoccupation majeure au Sénégal. Des centaines de Sénégalais meurent chaque année lors du périlleux voyage, à travers l’océan Atlantique, vers les îles Canaries, sous contrôle espagnol. Néanmoins, des citoyens comme Ndoye et Diouf estiment qu’il reste encore largement assez de temps pour que Faye s’attaque adéquatement à ces problèmes. Comme le dit Diouf, « un avenir radieux [est devant nous], mais il faut de la patience et de l’abnégation. »