Diplomatie

Macky Sall à la tribune de l’ONU : « je suis venu dire que l’Afrique a assez subi le fardeau de l’histoire »

Macky Sall à la tribune de l'ONU
Macky Sall à la tribune de l'ONU

Le président de la République Macky Sall s’est joint aux dirigeants du monde entier à la 77e session de l’Assemblée générale de l’Organisation des nations unies à New York pour traiter de défis mondiaux tels que l’impact du changement climatique, la guerre de la Russie en Ukraine ou la reprise après la pandémie de Covid-19. Prenant la parole au nom de l’Union Africaine dont il est le président, Macky Sall a prononcé un discours de haute facture qui est parti pour rester dans l’histoire. Il commence par interpeler le Conseil de sécurité afin qu’il traite de la même manière toutes les menaces à la paix et à la sécurité internationales, y compris en Afrique. Macky Sall a ensuite plaidé pour la fin de la stigmatisation de l’Afrique, demandant la levée des sanctions contre le Zimbabwe. Le chef de l’Etat a également insisté sur l’urgence d’instaurer « une gouvernance mondiale plus juste », alors que le système des Nations Unies et des Institutions de Bretton Woods va bientôt fêter les 80 ans de sa création. Alors que Dakar est connu pour être un défenseur historique des droits du peuple palestinien, le président de la République a également évoqué la situation au Proche Orient, réitérant « le droit du peuple palestinien à un Etat viable, coexistant pacifiquement avec l’Etat d’Israël ».

« Je suis venu porté le message d’un continent déterminé à travailler avec tous ses partenaire… Je suis venu dire que l’Afrique a accès subit le fardeau de l’histoire ». Les mots sont forts et ils ont été proclamé depuis la plus haute tribune politique du monde, la tribune des Nations unies. Ces mots sont du président de la République Macky Sall, lors de sa prise de parole hier à la tribune de l’Onu. Un discours de haute facture lors duquel, le chef de l’Etat a commencé par constater que « le monde est devenu plus dangereux et plus incertain, sous l’emprise combinée du réchauffement climatique, des périls sécuritaires et sanitaires, ainsi que de la guerre en Ukraine ». Ainsi, alors que le thème de cette session porte sur « un moment décisif : des solutions transformatrices à des défis interdépendants », Macky Sall pense que cela montre à quel point il urge d’agir ensemble pour apaiser les tensions, soigner notre planète, réduire les inégalités persistantes Nord-Sud, et redonner sens au multilatéralisme.

« Le Conseil de sécurité est interpelé au premier chef, afin qu’il traite de la même manière toutes les menaces à la paix et à la sécurité internationales, y compris en Afrique. Le terrorisme qui gagne du terrain sur le continent n’est pas qu’une affaire africaine. C’est une menace globale qui relève de la responsabilité première du Conseil, garant du mécanisme de sécurité collective, en vertu de la Charte de l’Organisation. Aussi, invitons-nous le Conseil à mieux s’engager avec nous dans la lutte contre le terrorisme en Afrique, avec des mandats plus adaptés et des moyens plus conséquents. », a déclaré le président Macky Sall, indiquant que « l’Union Africaine appelle, une fois de plus, à la levée des sanctions étrangères contre le Zimbabwe ».

« Ces mesures sévères continuent de nourrir un sentiment d’injustice contre tout un peuple, et d’aggraver ses souffrances en ces temps de crise profonde », tranche-t-il. Et d’ajouter en ce qui concerne le Proche Orient, que le Sénégal et l’Afrique réitèrent « le droit du peuple palestinien à un Etat viable, coexistant pacifiquement avec l’Etat d’Israël, chacun à l’intérieur de frontières sûres et internationalement reconnues ». Alors que pour ce qui est l’Europe, l’Afrique appelle à la désescalade et à la cessation des hostilités en Ukraine, pour une solution négociée, afin d’éviter le risque catastrophique d’un conflit potentiellement mondial.

Poursuivant, Macky Sall déclare que près de quatre-vingts ans après la naissance du système des Nations Unies et des Institutions de Bretton Woods, « il est temps d’instaurer une gouvernance mondiale plus juste, plus inclusive et plus adaptée aux réalités de notre temps ».

« Il est temps de vaincre les réticences et déconstruire les narratifs qui persistent à confiner l’Afrique à la marge des cercles décisionnels. Il est temps de faire droit à la juste et légitime revendication africaine sur la réforme du Conseil de Sécurité, telle que reflétée dans le Consensus d’Ezulwini », a fait savoir Macky Sall. Avant de rappeler, dans le même esprit, la demande africaine d’octroi d’un siège à l’Union Africaine au sein du G20, pour que l’Afrique puisse, enfin, se faire représenter là où se prennent les décisions qui engagent un milliard quatre cents millions d’africains.

Au titre de la gouvernance économique et financière, Macky Sall attire l’attention de l’Assemblée générale sur le Rapport 2022 sur le financement du développement durable, réalisé par une soixantaine d’institutions multilatérales, dont le Fmi, la Banque mondiale, le Comité de Bâle sur la supervision bancaire, l’Association internationale des régulateurs de l’assurance et le Conseil de stabilité financière. Ce rapport, dit-il, relève les insuffisances dans les procédés d’évaluation des Agences de notation, et souligne l’importance d’appliquer des « méthodologies transparentes afin de ne pas miner la confiance dans les notations ».

« Nous sommes préoccupés par le fait que la perception du risque en Afrique continue d’être plus élevée que le risque réel ; ce qui renchérit les primes d’assurance et pénalise la compétitivité de nos économies. C’est pourquoi l’Afrique renouvelle sa proposition au Groupe de Réponse à la crise mondiale sur l’alimentation, l’énergie et les finances, afin qu’il engage, en rapport avec le G20, le Fmi et la Banque Mondiale, un dialogue constructif avec les agences de notation sur l’amélioration de leurs méthodes de travail et d’évaluation. Dans le même esprit, face à l’ampleur inédite de la crise économique mondiale, l’Union Africaine réitère son appel pour la réallocation partielle des Droits de Tirages spéciaux et la mise en œuvre de l’Initiative du G20 de suspension du service de la dette », dit-il. Et d’ajouter que ce choc sans précédent fragilise davantage les économies les plus faibles, et rend encore plus pressants leurs besoins en liquidités, pour atténuer les effets de l’inflation généralisée et soutenir les ménages et les couches sociales les plus vulnérables, notamment les jeunes et les femmes. A cela s’ajoute la prise en charge des urgences sanitaires nouvelles ou anciennes, dont le cancer, un tueur silencieux qui continue de faire des millions de victimes à travers le monde. « J’appelle à la mobilisation en faveur de la campagne Rays of hope, de l’AIEA, pour le renforcement des capacités des pays membres, africains en particulier, dans la lutte contre le cancer, grâce aux technologies nucléaires telles que l’imagerie médicale, la médecine nucléaire et la radiothérapie », a fait savoir Macky Sall, renouvelant l’attachement de l’Afrique à l’Accord de Paris sur le climat.

En même temps, dit-il, le continent souhaite parvenir à un consensus pour une transition énergétique juste et équitable, comme ce fut le cas au Sommet Afrique-Europe de février dernier, à la session élargie du Sommet du G7 en juin, et récemment au Forum de Rotterdam sur le financement de l’adaptation en Afrique. « Il est légitime, juste et équitable que l’Afrique, continent le moins pollueur, et le plus en retard sur le processus d’industrialisation, exploite ses ressources disponibles pour disposer d’une énergie de base, améliorer la compétitivité de son économie et réaliser l’accès universel à l’électricité. Je rappelle qu’à ce jour plus de 600 millions d’africains vivent encore sans électricité. Travaillons également à la réalisation de l’objectif de 100 milliards de dollars par an, en appui aux efforts d’adaptation des pays en développement, et au financement du Programme d’accélération de l’adaptation en Afrique, sous l’égide de la Bad et du Centre mondial pour l’adaptation », dit-il, considérant le financement de l’adaptation non comme de l’aide, mais comme une contribution des pays industrialisés à un partenariat mondial solidaire, en contre partie des efforts que fournissent les pays en développement pour éviter les schémas pollueurs qui ont plongé la planète dans l’état d’urgence climatique actuel.

« Au-delà des urgences conjoncturelles, je suis venu porter le message d’un continent déterminé à travailler avec tous ses partenaires, dans une éthique relationnelle de dialogue confiant et de respect réciproque. Je suis venu dire que l’Afrique a assez subi le fardeau de l’histoire ; qu’elle ne veut pas être le foyer d’une nouvelle guerre froide, mais plutôt un pôle de stabilité et d’opportunités ouvert à tous ses partenaires, sur une base mutuellement bénéfique. Je suis venu dire que nous n’ignorons pas l’Afrique des problèmes, qu’il faut pacifier et stabiliser. Mais je suis également venu dire que nous avons aussi l’Afrique des solutions, avec ses 30 millions de km2, ses ressources humaines, plus de 60% des terres arables du monde, ses richesses minières, forestières, hydriques et énergétiques », a plaidé le président en exercice de l’Union africaine.

Avant de dire à qui veut l’entendre que « nous avons l’Afrique des solutions ». Une Afrique, dit-il, avec des gouvernements à la tâche ; une jeunesse vibrante et créative qui innove, entreprend et réussit ; des millions d’hommes et de femmes qui travaillent dur pour nourrir, éduquer et soigner leurs familles ; qui investissent, créent de la richesse et génèrent des emplois.

« Cette Afrique des solutions souhaite engager avec tous ses partenaires des rapports réinventés, qui transcendent le préjugé selon lequel qui n’est pas avec moi, est contre moi. Nous voulons un multilatéralisme ouvert et respectueux de nos différences ; parce que le système des Nations Unies, né sur les cendres de la guerre, ne peut emporter l’adhésion de tous que sur la base d’idéaux partagés, et non de valeurs locales érigées en normes universelles. C’est en collaborant dans le respect de nos différences que nous redonnerons force et vitalité à la raison d’être des Nations Unies : c’est-à-dire préserver les générations actuelles et futures du fléau de la guerre, promouvoir la cohabitation pacifique des peuples et favoriser le progrès en instaurant de meilleures conditions de vie pour tous. Je souhaite plein succès aux travaux de la 77e session de l’Assemblée générale. Je vous remercie », en conclu Macky Sall.


Abdoulaye NDAO

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