Présidentielle au Sénégal : début de la campagne électorale avec un candidat en prison
Et c’est reparti pour l’élection présidentielle au Sénégal. Les candidats à l’élection du 24 mars se sont lancer ce samedi 9 mars dans une campagne électorale express, après plusieurs semaines d’incertitude. Bassirou Diomaye Faye, secrétaire général et membre fondateur du parti dissous Pastef, fait partie des dix-neuf candidats à l’élection présidentielle désormais fixée au 24 mars.
Son nom est dans toutes les bouches, chanté, scandé, son visage sur les tee-shirts, les casquettes. Et pourtant, au premier grand meeting de sa coalition dimanche 10 mars à Dakar, le candidat d’opposition Bassirou Diomaye Faye n’occupe pas le devant de la scène : il est toujours derrière les barreaux.
Qu’importe, une foule compacte de milliers de sympathisants remplit un terrain de football sablonneux du quartier des Parcelles assainies, dans le nord de la capitale du Sénégal. Quelques-uns ont trouvé un point de vue avantageux en grimpant sur la barre transversale des buts. D’autres suivent le meeting depuis les toits terrasse des immeubles alentours. « Tout le monde est venu pour montrer notre force, montrer que nous sommes majoritaires dans le pays », explique posément Abdourahmane Sankhare, un professeur de sciences de 30 ans.
Bassirou Diomaye Faye, candidat de l’opposition antisystème, est en prison depuis presque un an pour « outrage à magistrat ». Secrétaire général et membre fondateur du parti dissous Pastef, il est l’un des dix-neuf candidats à l’élection présidentielle désormais fixée au 24 mars après avoir été ajournée.
Les spéculations vont bon train sur une prochaine sortie de prison à la faveur d’une loi d’amnistie récemment votée ou d’une remise en liberté provisoire, mais la campagne a débuté sans lui. Ses soutiens rencontrés dimanche le répètent à l’envi : l’important, c’est le projet et pas le candidat. Le fait qu’il soit encore détenu, « ça nous motive encore plus », assure Ramatoulaye Diédhiou, une assistante de 28 ans. « De toute façon, s’il est élu, il ne va pas gouverner en prison ! », souligne-t-elle. « Notre rêve le plus fou, c’est de le voir sortir de prison pour aller directement à la présidence », abonde Abdourahmane.
Ousmane Sonko, le grand absent
Autre grand absent incontournable des rassemblements de la coalition : Ousmane Sonko, arrivé en troisième position à la présidentielle de 2019, également en prison, et dont la candidature a été invalidée. Il a appelé à voter pour son camarade de lutte Bassirou Diomaye Faye, inspecteur des impôts et domaines comme lui. Son visage figure sur pratiquement tous les supports de la coalition, en vis-à-vis de celui du candidat officiel, avec le slogan « Ousmane mooy Diomaye » (« Ousmane, c’est Diomaye », en wolof). « Quand Ousmane dit que tout ce qui appartient au peuple doit revenir au peuple, ça me parle. Qu’il y aura plus de justice, ça me parle aussi », explique Ramatoulaye.
Samedi, les cadres de la coalition ont présenté leur programme à la presse, avec plusieurs mesures fortes : la disparition du poste de premier ministre et la création d’un poste de vice-président, la naissance à terme d’une monnaie nationale en lieu et place du franc CFA et la renégociation des contrats sur les hydrocarbures dont la production doit débuter en 2024. « Notre programme est long et riche. On n’aura pas assez de dix ans pour tout mettre en œuvre », affirme Fary Yague, étudiante de 26 ans en cinquième année de transport logistique. « Il nous faudra cinquante ans au pouvoir », précise-t-elle en souriant.
La plupart des supporteurs rencontrés se disent persuadés d’une victoire dès le premier tour. D’après les analystes politiques, l’élection s’annonce comme très indécise et personne n’est assuré d’être au second tour.
Avec Le Monde